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considérables, il lui avait donné l’ordre de garder les abords du Palais-Bourbon. Mais le général Bedeau n’exécuta point cet ordre et prétendit qu’ayant consulté ses officiers sur la question de savoir s’il fallait charger la bande qui se portait sur la Chambre, il avait trouvé chez eux de la résistance [1].

L’envahissement de la Chambre par les insurgés mit la Duchesse d’Orléans dans la nécessité de se réfugier avec ses fils, aux Invalides. À son tour, la monarchie de Juillet s’effondrait devant l’émeute.

Bien des esprits demeurèrent alors surpris de la promptitude avec laquelle Louis-Philippe se décida à abdiquer, de la précipitation qu’il mit à quitter Paris et se demandèrent pour quel motif, une fois à l’abri de l’émeute, le Roi ne tenta point de réunir des troupes pour faire valoir les droits de son petit-fils.

M. Hébert, qui, quelques mois après la révolution de Février, était allé en Angleterre saluer le souverain détrôné, lui demanda des éclaircissements à ce sujet et fit ainsi à mon père le récit de cet entretien.

Louis-Philippe répondit à M. Hébert qu’après avoir consacré dix-huit années à faire triompher, au dehors comme au dedans, une politique conservatrice, il n’avait pas trouvé convenable, à son âge, de changer de système, et surtout d’en changer devant la violence, estimant d’ailleurs que, si une autre ligne de conduite s’imposait, c’était au Gouvernement de la Régente que cette charge devait incomber. Par suite, pour éviter de donner tout embarras, de porter même le moindre ombrage, il était parti pour Dreux avec l’intention d’y rester jusqu’à ce que le nouveau Gouvernement eût été constitué. Mais, au milieu de la nuit, il avait appris, du sous-préfet, la proclamation de la République.

Des paroles du Roi M. Hébert croyait pouvoir conclure que le voyage de Varennes, le retour de Louis XVI à Paris, et les tristes événements qui s’accomplirent ensuite, se présentèrent en foule à l’imagination de Louis-Philippe et que, craignant un sort pareil à celui de Louis XVI, il avait cru devoir, pour l’éviter, prendre la fuite.

  1. Récit de M. Hébert.