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Les fusils, pour nous, c’est une question vitale. L’Empereur, en consentant à nous en céder la plus grande quantité possible, nous rend un immense service. La France a de si puissants moyens de production, qu’elle peut bien nous venir en aide, sans que, pour cela, elle ressente le moindre inconvénient.

Je demande pardon d’avoir abusé et de la patience et de la bienveillance de Votre Altesse en lui écrivant une lettre si longue et si pleine de requêtes. Qu’elle me pardonne en faveur de la cause pour laquelle je plaide, cause qui courrait bien des dangers, si elle était abandonnée en France, dans les hautes régions du pouvoir, par le petit nombre d’âmes d’élite qui comprennent qu’en contribuant à la résurrection de l’Italie, ils ne font pas seulement une grande et belle action, mais qu’ils servent les véritables intérêts de leur pays.

J’ai l’honneur de renouveler à Votre Altesse Impériale l’assurance de mon profond et respectueux dévouement.


Turin, 29 décembre 1860.

Monseigneur,

Je ne saurais laisser achever cette année durant laquelle Votre Altesse Impériale m’a donné des preuves répétées de sa bienveillance, sans lui exprimer les sentiments de profonde reconnaissance et de respectueux attachement dont je suis animé envers elle.

L’année qui expire a vu s’accomplir de grands événements, glorieux pour la France, immensément avantageux pour l’Italie. Elle lègue, il est vrai, à celle qui va commencer, de grandes difficultés. Gaëte, Rome, Venise, sont des points noirs à l’horizon, autour desquels des nuages menaçants peuvent s’accumuler. Mazzini et Garibaldi d’un côté, Pie IX et Antonelli de l’autre, peuvent nous susciter de grands embarras. Toutefois, je suis plein de confiance dans l’avenir. Si l’Empereur ne prête pas l’oreille à nos ennemis, s’il ne nous retire pas son appui, nous poursuivrons d’un pas ferme la route qu’il nous a ouverte, et qui nous mènera, tôt ou tard, mais d’une façon certaine, au terme dernier de nos aspirations : l’unification de l’Italie.

Nigra m’a communiqué le projet de voyage de Votre Altesse : je l’ai approuvé de grand cœur. Non seulement il ne saurait avoir d’inconvénients, mais il doit avoir d’heureuses conséquences pour nous. Votre Altesse jugeant par elle-même pourra donner