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du pacte qui fait à tout membre de la Société une obligation « d’observer ses engagements internationaux. » C’est un cercle vicieux ! Plus tard, lorsque l’Allemagne aura de nouveau reconnu sa dette et accepté ses obligations, la Société des Nations aura peut-être son mot à dire et son rôle à jouer ; il ne s’agit, pour le moment, que de briser la résistance allemande. — Dans le même esprit, la Commission temporaire mixte pour la réduction des armements, qui vient de tenir session à Genève les 9 et 10 février, a constaté que, comme l’a fort bien dit M. Viviani, « la solution dépend de ceux qui ont la responsabilité, c’est-à-dire les Gouvernements ; » elle a reconnu que la sécurité nationale ne peut pas s’exprimer par des chiffres de soldats ou de canons, et que c’est une mauvaise méthode de chercher à prévenir les guerres en supprimant les moyens de combat au lieu de s’attaquer aux causes qu’ont les peuples de s’armer.

Les événements confirment les inquiétudes que nous inspirait l’affaire de Memel. Le Gouvernement lithuanien a d’abord accepté la solution proposée par la Commission interalliée que préside, avec beaucoup d’autorité, M. Clinchant ; il devait retirer ses troupes du territoire de Memel où serait restaurée publiquement l’autorité du Haut-Commissaire représentant les Puissances alliées ; les gardes locales seraient placées sous le commandement du colonel français Trousson. La Commission avait été autorisée à promettre que, si ces formalités étaient accomplies, la Conférence des ambassadeurs attribuerait le territoire à la Lithuanie. Le scénario se déroula suivant ce programme auquel le Gouvernement de Kovno se conforma à peu près jusqu’au moment où, le 20 février, le Haut-Commissaire et la garnison française, après avoir installé un Gouvernement provisoire dirigé par M. Gailius et lui avoir notifié la décision de la Conférence des ambassadeurs, se furent embarqués à bord des navires de guerre qui levèrent l’ancre. Les Alliés, en somme, en sauvant les apparences, acceptaient le fait accompli. Les Lithuaniens, loin de s’en montrer reconnaissants, se sentirent encouragés à de nouvelles exigences ; peut-être aussi y furent-ils poussés par Tchitchérine qui, venant de Lausanne et de Berlin, est passé par Kovno. Toujours est-il que le gouvernement lithuanien n’accepte pas sans réserves la décision du Conseil des ambassadeurs, qui est cependant toute en sa faveur, sous prétexte qu’elle contient quelques restrictions relatives à la liberté du commerce dans le port de Memel et à la navigation du Niémen. Du côté de Wilno, ils s’opposent par la force à l’avance des gardes-frontières polonais qui prétendent occuper la zone attribuée à la