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financiers ? Ce sont l’impôt en nature et les impôts en argent.

L’impôt en nature est prélevé sur les paysans. Il dépend essentiellement de l’état de la production agricole. Or, la nouvelle politique économique du Gouvernement n’a apporté aucune amélioration dans la situation agricole du pays ruinée par l’expérience communiste et profondément atteinte par la dernière famine. La décadence de l’agriculture et l’appauvrissement des paysans ont été récemment reconnus par le rapport du commissaire à l’Agriculture présenté à la Conférence réunie des représentants du Conseil du travail et de la Défense nationale, du Comité central du parti communiste et du Bureau du Comité central exécutif. Il résulte de ce rapport que les emblavures d’hiver ont subi, en 1923, par comparaison avec l’année précédente, une diminution de 10 à 15 p. 100 et ne constituent plus que 40 p. 100 des emblavures d’avant-guerre. Pour les ensemencements de printemps, il manque environ 600 millions de pouds de grains et il sera impossible de fournir à temps plus de la moitié de cette quantité. D’ailleurs, si même on arrivait à fournir aux paysans la totalité des graines dont ils ont besoin pour les ensemencements de printemps, il leur serait impossible de les utiliser, étant donnée la destruction du cheptel. Le nombre d’exploitations paysannes dépourvues de chevaux atteint 30 p. 100. Ces données ont été entièrement confirmées par le rapport que Mesyatzoff a présenté, en décembre 1922, au Congrès Panrusse des Soviets.

Dans ces conditions, le montant de l’impôt en nature prélevé en 1922, et qui est de 300 millions de roubles-or, doit être considéré comme un maximum qui n’a pu être atteint que grâce à une récolte relativement bonne.

Avant la guerre, les populations rurales payaient, en impôts et taxes d’Etat, environ 1 400 millions de roubles (11,23 roubles par tête). Par conséquent, elles versaient à l’Etat, sans mesures de coercition et sans l’intervention de la force armée, cinq fois plus d’impôts que n’en peut percevoir le Gouvernement soviétique avec son système actuel.

Abstraction faite de sa consommation personnelle (16 pouds par tête en moyenne), la population rurale de Russie réalisait avant la guerre des excédents de céréales suffisants, non seulement pour faire face aux impôts d’Etat, mais encore pour faire l’acquisition des produits manufacturés dont elle avait besoin.