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Dans l’espace des vingt années qui précédèrent la Grande Guerre, la longueur du réseau ferré avait doublé. Elle était de 34 980 verstes en 1895, de 60 524 en 1910, de 61 684 en 1911, de 62 293 en 1912 et de 63 153 en 1913. Les recettes nettes étaient en 1913 de 467 millions de roubles, dont 310 millions pour le réseau d’État et 157 millions pour le réseau concédé. Parallèlement à l’augmentation des bénéfices des chemins de fer concédés, la participation de l’Etat dans ces bénéfices a passé de 3 868 000 roubles en 1909 à 19 922 000 en 1911, et à 33 976 000 en 1913. Le commerce extérieur reflétait les progrès de l’activité

économique du pays. En l’espace de quinze années, la valeur des exportations et des importations avait doublé : les exportations étaient passées de 733 millions de roubles en 1898 à 1 420 millions de roubles en 1913, et les importations de 617 millions à 1 221 millions de roubles. La balance commerciale donnait constamment des excédents considérables, suffisants pour couvrir le service des emprunts extérieurs.

La Russie était considérée, à juste titre, comme le véritable grenier de l’Europe et son principal fournisseur de matières premières. En 1913, dernière année avant la guerre, la Russie a fourni au marché mondial 10 672 000 tonnes de céréales, dont 3 326 000 tonnes de froment et 3 934 000 tonnes d’avoine. L’exportation du bois est passée de 5,16 millions de tonnes en moyenne pendant les années 1904-1908, à 7,66 millions de tonnes en moyenne pendant les années 1909-1913. En 1913, l’exportation atteignait 7 730 000 tonnes, soit plus d’un tiers de la quantité exportée par les Etats-Unis, le Canada, les pays scandinaves et l’Autriche-Hongrie réunis. L’exportation du lin représentait 75 pour 100 de la consommation totale de l’industrie européenne. En pétrole et produits du pétrole, près d’un million de tonnes. Ajoutez trois milliards et demi d’œufs et environ 80 000 tonnes de beurre. Pour toute une série d’articles d’exportation, tels que platine, manganèse, bois pour allumettes, la Russie avait une sorte de monopole naturel.

Enfin, la Russie, avec sa population qui augmentait sans cesse et atteignait 174 millions d’habitants en 1913, contre 128 millions en 1897, formait pour l’économie mondiale un marché extrêmement vaste et présentant pour l’avenir des possibilités à peu près illimitées.

Cette situation économique si favorable constituait pour les