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de leur retranchement. Le détail n’avait pas échappé à « certain chasseur de Montauban. »

Le 17 septembre, ayant rempli son arquebuse « de fort grosses postes, » il se tenait à l’affut. Tout à coup, dans la tranchée, un grand bruit de voix, une foule grossissante ; au milieu de la foule, le duc de Mayenne montrant les travaux à son cousin le duc de Guise. Le « chasseur » met en joue et tire. Mayenne tombe ; l’arquebusade lui a crevé l’œil, traversé la tête. Fatale blessure, encore plus cruelle et plus tragique que la blessure semblable, reçue dans les mêmes conditions, par le glorieux général Maunoury !

La balle qui avait tué Mayenne fut portée au Roi, « laquelle ayant vue, racontent les Mémoires du marquis de Castelnau, il dit incontinent que c’était Castelnau qui devait avoir fait le coup, et qu’il connaissait le calibre de son arquebuse. Et ce, parce que, quelque temps auparavant, il avait eu l’honneur d’en donner une à Sa Majesté de semblable calibre, et que le Roi savait qu’il n’y en avait guère de mieux ajustés à tirer que lui. »

Pauvre Mayenne ! si galant, si libéral, si magnifique pendant son ambassade à Madrid neuf années plus tôt, lui que « son ambition, son courage et sa capacité pouvaient faire agréer et porter partout où un homme puisse prétendre, » le voilà frappé à quarante-trois ans, abattu sans gloire au détour d’une tranchée par un seigneur huguenot !


LA FORCE.