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fait un séjour ; grâce à son énergie et à l’appui résolu de la Société des Nations, le salut de l’Autriche paraît assuré, pourvu que les crédits qui lui sont promis et dont elle ne peut se passer, soient promptement fournis. Tandis que Mgr Seipel recevait à Paris le plus favorable accueil, le général Ludendorf, invité à Klagenfurt (Styrie) par les pangermanistes, s’y faisait houspiller par les socialistes. La grande masse de l’opinion, en Autriche, appuie l’homme d’État énergique et probe qui a rendu au pays, dans des circonstances si difficiles, courage et confiance. C’est un succès qui fait autant d’honneur au Gouvernement de l’Autriche qu’à la Société des Nations et à son haut-commissaire, M. Zimmermann, bourgmestre de Rotterdam.

Le Conseil a eu à statuer sur plusieurs autres questions, mais, contrairement aux espérances de Berlin, il n’a pas eu à s’occuper, si ce n’est pour l’écarter, du différend franco-allemand. Un incident, qui vaut la peine d’être relevé, a terminé la session. Entre la Lithuanie et le territoire de Wilno, occupé par les Polonais, s’étend une bande de terrain neutralisé où aucune police ne faisait sentir son action et où se réfugiaient les malandrins du pays ; le Conseil a « recommandé » une ligne frontière ; le représentant de la Pologne, Askenazy, a déclaré que son Gouvernement acceptait, encore qu’elle ne lui donnât pas toute satisfaction, la « recommandation » du Conseil ; mais le délégué lithuanien protesta et déclara que son pays « repousserait par tous les moyens » la solution préconisée. M. Viviani, qui présidait, releva comme il convenait, avec l’approbation de tous ses collègues, le langage du représentant de la Lithuanie ; le recours à la force, qu’il ne craignait pas d’invoquer, mettrait son pays « en rupture de pacte » et attirerait sur lui les sanctions prévues par l’article 16 du pacte : blocus économique, exclusion de la Société des Nations. L’incident n’aurait en lui-même qu’une importance secondaire s’il n’apparaissait en corrélation avec l’affaire de Memel, dont nous avons montré la gravité, et qui n’est pas aplanie. La diète de Kovno a voté la réunion du territoire de Memel à la Lithuanie. Les troupes lithuaniennes s’organisent et se renforcent. Cependant, aux dernières nouvelles, sur un ultimatum de la Commission interalliée, le Gouvernement lithuanien se serait résolu à céder, aurait promis de retirer ses troupes et de rétablir l’autorité des Alliés conformément au traité. Souhaitons que cette conversion soit sincère et durable. Peut-être les Lithuaniens ont-ils enfin compris que, pour s’affranchir de l’influence des Alliés qui est leur sauvegarde, ils se mettent à la merci du Gouvernement de Berlin ou