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jusqu’au détroit de Magellan, entre les 8e et 54e degrés de latitude Sud, sur plus de cinq mille kilomètres.

Le Chili s’était préparé à la guerre avec un soin et une compétence dont témoignait l’état de sa flotte. En 1873, deux cuirassés d’une assez grande puissance pour l’époque et du dernier modèle, l’Amiral Cochrane et le Blanco Encalada, avaient été construits pour lui en Angleterre, tous deux de 3 500 tonnes, avec une machine de 3 000 chevaux, munis d’une artillerie puissante et d’une solide protection ; il disposait en outre de trois corvettes assez solidement armées et de deux petits bâtiments en bois de médiocre valeur. Un certain nombre d’officiers avaient fait un stage dans la marine britannique, et le nom de beaucoup d’autres témoigne de leur origine anglo-saxonne.

Le Pérou ne pouvait lui opposer que le Huascar, monitor faiblement cuirassé mais bien armé, qui datait de 1866, de 1 100 tonnes, avec une machine de 300 chevaux, la Independencia, frégate très faiblement cuirassée de 2 000 tonnes et de 550 chevaux, datant de 1865, et deux petites corvettes en bois. Deux garde-côtes de 2 600 tonnes, véritables batteries flottantes qui ne pouvaient figurer dans un combat naval, stationnaient, l’un, le Atahulpa, au Callao, et l’autre, le Manco Capac, à Arica.

La Bolivie ne disposait d’aucun navire de guerre ; le Chili avait en nombre de bâtiments une supériorité presque double sur les alliés et, en comparant les unités de même ordre dans les deux camps, il gardait un grand avantage en tonnage, en vitesse, en artillerie et en protection.


L’occupation de la zone maritime de la Bolivie avait commencé le 14 février par le débarquement de 500 Chiliens à Antofogasta, sous le commandement du colonel Sotomayor, qui fut promptement renforcé ; les autorités boliviennes s’étaient retirées dans le petit village de Calama, où le sous-préfet, docteur Cabrera, en l’absence des troupes régulières, fit une défense très honorable avec une poignée d’hommes ; pendant que la médiation du Pérou essayait de prévenir la guerre en agissant, à Santiago, les troupes chiliennes s’établissaient dans tout le littoral bolivien. Le 5 avril, le jour même de la déclaration de guerre au Pérou, l’escadre chilienne bloquait le port d’Iquique, le plus important de la province péruvienne de Tarapaca,