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d’aujourd’hui sépare le directeur du salarié, que d’amener les ouvriers à saisir par eux-mêmes les difficultés inhérentes à la direction des entreprises. A côté des Conseils mixtes ont été institués des « Industrial representatives » pour servir d’intermédiaires entre les grands chefs et les salariés. Sortes de missi dominici ou d’officiers de liaison chargés par celui qui commande de le renseigner sur les faits et gestes et sur l’esprit du personnel, ils ont aussi la mission de le représenter auprès des ouvriers et de montrer à ceux-ci l’autorité suprême sous un visage humain.

Dans certaines compagnies, notamment à la « Demuth Co » (fabrique de pipes de fumeurs, Richmond Hill, New-York), le système comporte deux Conseils : une chambre et un sénat ; leurs décisions sont exécutées par le cabinet, c’est-à-dire par le directeur de la compagnie. La chambre se compose de trente représentants des ouvriers élus par eux ; le sénat, de contremaîtres, contrôleurs, chefs d’ateliers, etc... Les sessions ont lieu une fois par semaine. Les deux assemblées délibèrent sur les questions touchant la vie de l’usine : heures de travail, salaires, discipline, règlements d’ateliers, nomination d’une partie des contremaîtres. Mais elles n’ont pas le droit de s’immiscer dans la gestion technique, commerciale et financière.

D’une manière générale, ces Conseils se bornent à étudier les questions qui sont de la compétence des ouvriers, ou à discuter du point de vue ouvrier les questions d’intérêt général. Ils se réunissent ensuite avec un nombre égal de membres de la direction en un Conseil mixte pour préparer les décisions qui seront soumises à la direction.

Le plus souvent, ils sont chargés aussi d’administrer les œuvres sociales créées par le patron au profit des ouvriers. Leurs attributions varient en étendue et en importance suivant que l’industrie à laquelle ils appartiennent emploie surtout des employés qualifiés ou des manœuvres d’une classe inférieure. C’est ainsi que M. Cestre cite des cas où le Conseil participe à l’application du système Taylor, si mal vu, si redouté même par les ouvriers américains.

L’avantage principal qu’on leur reconnaît est d’avoir établi le contact par relations directes entre employeurs et employés. Un des sociologues américains qui ont écrit sur le régime démocratique de l’industrie a intitulé son livre Man to Man, indiquant