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de faciliter la dictature de la classe ouvrière, mais d’arracher les industries russes à la mainmise des Allemands, qu’a organisée le traité de Brest-Litowski : seuls les monopoles de l’Etat échappaient à ses dispositions.

Quoi qu’il en soit, à la fin de 1919, la nationalisation s’étend à quatre mille entreprises, c’est-à-dire à la presque totalité des industries grandes et moyennes. Impossible, dans ces conditions, de tolérer une action divergente. Aussi le contrôle ouvrier est-il réduit à un rôle de vérificateur, sans aucun droit d’intervenir dans l’exécution des ordres du pouvoir central. Pour l’administration de l’usine, ses représentants n’auront plus que voix consultative ; le pouvoir de donner des ordres est attribué exclusivement à la direction, composée de techniciens. Ainsi en décide le deuxième congrès russe des Conseils de l’économie nationale.

Enfin on reconnaît que, même avec les restrictions apportées à leur action, les Comités ne font qu’entraver la bonne marche des entreprises. « Le Comité d’usine a des liens trop étroits avec les ouvriers ; ses membres ne cherchent qu’à conserver leur situation ; il fait donc aux ouvriers toute sorte de concessions et tranche toujours dans leur sens les litiges qu’il est appelé à juger en qualité de tribunal sans appel. Il est le plus souvent incapable d’élever ses vues jusqu’à l’intérêt général et, si parfois il y réussit, on peut dire que ses jours sont comptés. » En conséquence, les Comités d’usine seront supprimés ; à la tête de chaque fabrique, il y aura un gérant.

La seule concession qui soit encore faite aux travailleurs est qu’on leur laisse le droit d’approuver les candidatures à la gérance que propose la direction de l’usine. Finalement ils sont revenus à la situation dans laquelle ils se trouvaient sous le régime capitaliste. Mais l’industrie russe ne se relèvera pas avant bien longtemps de la ruine où l’a précipitée en quelques mois le régime anarchique des Conseils d’ouvriers. Les économistes soviétistes, Lénine lui-même, ne font pas difficulté de reconnaître les causes qui ont arrêté presque complètement la production : l’absence de stimulant, de responsabilité et de chef.


LES REVENDICATIONS DE LA C. G. T. FRANÇAISE

Il semble que cet exemple aurait dû servir de leçon. Si favorable que fût la C. G. T. au contrôle ouvrier, elle dut se rendre