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primaires supérieures de Berlin, où les maîtres, qui enseignaient le français et l’anglais, étaient des étrangers, auxquels on avait strictement interdit de recourir à la méthode de traduction.

Il n’est cependant pas venu à l’idée des autorités scolaires en Alsace et en Lorraine d’exiger l’emploi rigide et exclusif de la méthode directe ainsi comprise. On tolère que l’instituteur, pour simplifier son travail, ait recours au dialecte quand il veut donner à ses élèves la signification exacte du mot français dont il va dorénavant se servir dans son enseignement. Cela peut provoquer un léger retard dans le fonctionnement du mécanisme linguistique chez l’enfant ; mais c’est parfois une nécessité découlant davantage des aptitudes encore limitées du maître que des facultés réceptives de ses jeunes disciples.

On a prétendu que l’emploi de la méthode directe entraînerait la perte d’une année pour les élèves des écoles primaires, dont toute l’attention serait retenue pour la constitution d’un vocabulaire suffisant. Quand bien même le fait serait établi, il y aurait encore intérêt à donner aux enfants une connaissance du français leur permettant ensuite de suivre avec profit toutes les autres leçons qui leur seront données dans cette langue. Mais un maître intelligent et une maîtresse ingénieuse pourront facilement, même en disposant d’un nombre de mots d’abord limité, aborder avec leurs élèves les premiers éléments de l’instruction générale. Qui les empêchera par exemple de faire faire des additions et des soustractions avec les chiffres énoncés en français que la mémoire si souple des petits aura retenus ?

Le but à atteindre est, de toute évidence, de familiariser suffisamment les jeunes Alsaciens avec la langue française pour que tous les cours prévus par le programme puissent être professés dans cette langue. Toute la querelle porte sur la méthode qui permettra de l’atteindre le plus rapidement et le plus sûrement.

Or, il me semble incontestable que plus tôt on commencera à parler français, plus le succès sera complet. Prenons en effet l’hypothèse où la méthode de comparaison ou de traduction serait appliquée. Qu’arrivera-t-il ?

Le petit élève commencera par apprendra péniblement les déclinaisons et les conjugaisons allemandes, qui s’éloignent de son dialecte. Après deux années de ce travail ardu, on mettra entre ses mains une grammaire comparée. On lui fera faire des