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Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise au coin du feu, devisant et filant…

Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage
Ou comme cestuy-là qui conquit la toison...

Sévigné, de qui les attraits
Servent aux Grâces de modèles...


Réponse de Turenne, quelques instants avant sa mort, à M. d’Hamilton qui l’engageait à se détourner d’un passage dangereux : Monsieur, vous avez raison ; je ne veux point du tout être tué aujourd’hui ; cela sera le mieux du monde.

Certains critiques reprochent à Chénier la strophe finale de la Jeune captive, dont la grâce un peu madrigalesque leur parait jurer avec l’ensemble de l’immortel poème. Ne voient-ils donc pas ce qu’elle y ajoute en le datant ?


Et, comme elle, craindront de voir finir leurs jours
Ceux qui les passeront près d’elle.


Qu’est-ce les Anecdotes et bons mots de Chamfort, sinon l’étincelant répertoire de l’esprit français au XVIIIe siècle ?

A la bataille de Rocoux ou de la Lawfeld, le jeune M. de Thyange eut son cheval tué sous lui, et lui-même fut jeté fort loin ; cependant il n’en fut point blessé. Le maréchal de Saxe lui dit : « Petit Thyange, tu as eu une belle peur, — Oui, Monsieur le Maréchal, dit celui-ci ; j’ai craint que vous ne fussiez blessé. »


Le théâtre de Favart a été écrit pour un public qui n’existe plus, pour des raffinés qui goûtaient les nuances sentimentales, les sous-entendus piquants, l’aimable facilité du bien dire. Cela donne à présent le même plaisir que de respirer quelque sachet très ancien, ou de manier de vieilles soieries aux couleurs à demi passées.


La Correspondance de la comtesse de Sabran et du chevalier de Boufflers est le dernier sourire de l’Ancien Régime, l’image d’un temps où l’on se donnait la peine, dans une lettre comme dans une conversation, de penser finement et de s’exprimer