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le premier pas, aussi, dans celle de l’élimination progressive des agents officiels prussiens, fonctionnaires de tous ordres, financiers, politiques, administratifs, qui nous ruinent [1] et dont nous ne voulons plus entendre parler, pas plus que des représentants de la fausse culture des gens de l’Est, professeurs, privat-docenten, instituteurs, etc... Il est essentiel que les éducateurs de notre jeunesse soient de chez nous, soient imprégnés de notre esprit, de nos tendances morales, philosophiques et religieuses, soient, enfin, les représentants qualifiés, autorisés de la belle civilisation rhénane. Nous n’avons que faire, ici, du militarisme, de l’esprit de caserne, du pangermanisme et de la « revanche. » Or, c’est cela que l’on enseigne encore, et plus que jamais, à nos enfants. En voilà assez !... »

Pour finir, Smeets entretient son auditoire, — qui n’a cessé de lui prodiguer les marques de la plus vive approbation, — d’une question qui préoccupe en ce moment tous les esprits, là-bas : celle de la création du « franc rhénan, » qui se substituerait, avec les plus précieuses garanties locales de valeur absolue et de fixité, au moins relative, dans ce temps d’instabilité des changes, au mark complètement déprécié, dont les fluctuations capricieuses font le désespoir de tous ceux qui ne spéculent pas sur ses bonds désordonnés. Le report, observe-t-il, des douanes du Reich à la frontière militaire et l’administration directe des finances rhénanes, — revenus domaniaux et impôts, — par les Rhénans, aplaniraient toutes les difficultés et assureraient au nouvel Etat le bienfait d’une saine monnaie.


En ce moment, quand crépitent encore les applaudissements provoqués par la péroraison de Smeets : l’appel vibrant au patriotisme rhénan et à la clairvoyance politique des protecteurs naturels de l’État qu’il s’agit de fonder, deux incidents vont se produire, émouvants à des titres divers, le premier que l’on pouvait prévoir, le second qui était inattendu, au moins de la presque totalité de l’assemblée.

A la table centrale se lève un des journalistes C’est un Belge. Au nom de la presse du Royaume, il prononce, en bon allemand, une courte harangue où il dit la chaude sympathie dont on entoure, sur la Meuse et sur l’Escaut, les efforts du

  1. Il y a 1 557 786 fonctionnaires dans la Rhénanie. Ils lui coûtent 45 milliards de marks.