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dont l’exploitation est en progrès constant. — Mais, au fait, dis-je, si Cologne prend une telle importance et qu’elle atteigne son million d’habitants, ce qui ne tardera guère, ne se souviendra-t-elle pas qu’elle appartint autrefois à la Hanse et que, sous ses Archevêques Électeurs, aux XVIIe et XVIIIe siècles, elle était, en somme, une ville libre ? Dans le cas où le mouvement autonomiste réussirait, n’y ferait-elle pas figure d’un Hambourg industriel ?

— Hé I Précisément, il en est fort question ; et le curieux est que ces velléités reçoivent, dit-on, de secrets encouragements. On dit déjà que les Britanniques se sont pour toujours établis à Cologne, au point de vue économique, s’entend. Il est certain qu’ils y font de très grandes affaires, qu’ils achètent maisons, fabriques, usines ; en quoi, du reste, ils doivent compter avec les Hollandais, les uns et les autres bénéficiant d’un change très élevé... Bref, Cologne, admirablement administrée par un homme remarquable, le bourgmestre Adenauer...

— Celui qui, en 1919, disait à l’un de nos officiers supérieurs : « Vous êtes surprenants, vous autres Français. Vous voulez certainement garder ce pays et vous ne vous informez même pas de ses ressources, de ses richesses. C’est comme si l’acquéreur d’une maison l’achetait sans l’avoir visitée... »

— Justement ; Cologne donc, sous M. Adenauer, est en passe de jouer un grand rôle,— mais un rôle à tendances particularistes sans doute,— dans les événements qui se préparent... car il est impossible, tout le monde en est d’accord, ici, que la situation actuelle se prolonge. Une révolution, quel qu’en soit le caractère, est inévitable...

— C’est l’avis de M. Smeets. Il nous le disait hier, en ajoutant que c’était de ce « mouvement » fatal, inéluctable, qu’il fallait profiter pour organiser « la République rhénane, indépendante, libre et neutre, » — cartel est, en résumé, son programme, qui se distingue de celui du docteur Dorten par l’adjonction de ce mot significatif : et neutre, formule concise de ce que nous appelons, nous autres, l’État-tampon.

Tout en devisant ainsi, nous arrivons à Bonn. Il est près de onze heures : une rapide visite de la ville, le déjeuner, la prise de contact avec diverses personnalités françaises et rhénanes venues de Coblence, de Mayence et du Palatinat, nous feront atteindre l’heure de la réunion du Congrès, au Kôlnerhof.