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appel aux Européens pour tous les arts relevés à la Cour de Moussa, à Màli. Ils avaient besoin de peintres, de ciseleurs en métaux précieux, d’architectes, de charpentiers, de facteurs d’orgues, de fabricants de vitraux et d’armes. Cette énumération, contenue dans une requête de l’an 1530, est vraisemblablement celle qu’ils adressaient déjà en 1427 au roi Alphonse d’Aragon et qu’ils réitéraient une vingtaine d’années plus tard. C’est que les treize maîtres d’arts expédiés par le roi d’Aragon avaient péri en route sans parvenir à passer. On avait compté sans le roi d’Egypte, qui pouvait à son gré accorder ou refuser le passage.

Alphonse d’Aragon, sur les instances des Ethiopiens, leur envoya le 18 septembre 1450 de nouveaux artistes et en promit un plus grand nombre, dès qu’une route sûre serait trouvée. Cette seconde mission s’achemina, nantie de brocarts et de tissus d’or et d’argent, par le long circuit de la Mer-Noire et du golfe Persique, avec des lettres de recommandation pour les empereurs d’Orient et de Trébizonde. Elle devait rencontrer à la Cour du Négus d’autres artistes européens.

Du temps du roi Dàwit ou David Ier, qui régna en Abyssinie de 1382 à 1411, un miniaturiste à sa solde déclarait impossible de continuer à enluminer un manuscrit, faute de couleurs : venu d’un pays lointain, il espérait achever son œuvre avec l’aide d’un « travailleur en peintures » des pays Francs. Un des successeurs de Dàwit, Ba’eda Màryàm (1468-1478), confiait à un peintre Franc l’église du trône de Marie, Atronsa Mâryàm. L’église voisine, celle de Gannata Giyorgis, fut couverte de fresques par le Vénitien Niccolò Brancaleone, venu en 1480 avec une mission fransciscaine et qui, trente-trois ans plus tard, résidait encore en Abyssinie.

Et il n’en sera point autrement au Congo. En 1489, une ambassade du Mani ou roi du Congo arrivait en Portugal, chargée de présents, d’ouvrages en ivoire et d’étoffes de palmes aussi veloutées que le satin d’Italie. Elle venait demander des ouvriers d’art pour construire des églises.


V. — LE COMMERCE MUET DE L’ÎLE DES PAILLETTES D’OR

Nous l’avons vu par le récit d’Antoine Malfant, la récolte de l’or était entourée de mystères, que rehaussaient de séculaires légendes. Suivant la géographie d’un Franciscain espagnol du