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Les exemples que je viens de mettre sous les yeux de Votre Majesté prouvent qu’en consentant au mariage de sa fille avec le prince Napoléon, il y a bien plus de chances de la rendre heureuse que si, comme son oncle et son père, il la mariait à un prince de la maison de Lorraine et de Bourbon.

Mais que Votre Majesté me permette une dernière réflexion. Si Votre Majesté ne consent pas au mariage de sa fille avec le prince Napoléon, avec qui veut-elle la marier ? L’Almanach de Gotha est là pour prouver qu’il n’y a pas de princes qui lui conviennent, et c’est tout naturel. La différence de religion s’oppose aux alliances avec les familles de la plupart des souverains qui règnent sur des pays à institutions analogues aux nôtres. Notre lutte avec l’Autriche, nos sympathies pour la France rendent impossibles celles avec des membres de familles tenant aux maisons de Lorraine et de Bourbon ; ces exclusions réduisent le choix de Votre Majesté au Portugal et à quelque petite principauté allemande plus ou moins médiatisée.

Si Votre Majesté daigne méditer sur les considérations que je viens d’avoir l’honneur de lui soumettre, j’ose me flatter quelle reconnaîtra qu’elle peut, comme père, consentir au mariage que l’intérêt suprême de l’Etat, l’avenir de sa famille, du Piémont, de l’Italie tout entière lui conseillent de contracter.

Je supplie Votre Majesté de me pardonner ma franchise et la longueur de mes récits. Je n’ai pas su, dans une question si grave, être plus réservé, ni plus bref. Les sentiments qui m’inspirent, les mobiles qui me font agir, sont une excuse que Votre Majesté voudra bien agréer...


Le comte de Cavour à S. A. I. le prince Napoléon.


25 octobre 1858.

Monseigneur,

Je profite d’une occasion pour remercier Votre Altesse Impériale des choses aimables qu’elle a bien voulu me faire dire par M. Nigra. J’en ai été profondément touché, car, depuis longtemps, je professe pour Votre Altesse une respectueuse sympathie, je me sens maintenant attaché à elle par les liens d’une sincère et vive reconnaissance pour la part éminente qu’elle prend à la grande entreprise qui doit assurer l’indépendance