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Parmi les sujets importants que cette commission aura à examiner, figure la question financière. L’augmentation du tonnage dont nous venons de parler a déterminé des besoins de trésorerie entièrement nouveaux. En outre, les frais d’exploitation ont subi un accroissement proportionnel à la hausse des matières premières. Il n’est pas jusqu’à la faiblesse de notre change qui n’ait eu une influence considérable sur la trésorerie des compagnies de navigation. Il est possible de se faire une idée de l’aggravation de leurs frais généraux en prenant un exemple emprunté au dernier rapport de l’assemblée générale de l’une de nos grandes firmes. Il y est dit que les stocks de charbon sont passés de 885 000 francs à 4 millions. Les frais d’équipage de 9 à 37 millions ; l’outillage d’armement de 6 à 40 millions. Les frais de nourriture des passagers et le service des marchandises, de 20 à 168 millions. Dans l’ensemble, les avances se sont élevées de 34 à 219 millions, soit une différence de plus de 700 pour 100. Un grand paquebot, qui autrefois quittait le port avec des avances d’armement se montant à 210 000 francs, demande aujourd’hui pour appareiller 820 000 francs. Ces exemples se répètent sur tous les navires et dans toutes les compagnies. Il en résulte que l’armement français travaille aujourd’hui avec un working-capital beaucoup plus élevé qu’autrefois. La quantité de tonnage inscrite à l’inventaire des Compagnies a augmenté de 100 pour 100. La valeur de ce tonnage s’est accrue de 400 pour 100. Le fonds de roulement a subi une augmentation de 500 pour 100 environ. On n’est pas au-dessus de la vérité en affirmant que les bilans des Sociétés de navigation se soldent par des totaux cinq ou six fois plus forts qu’avant la guerre.

D’où la nécessité pour ces sociétés de faire largement appel au crédit public. Comme le marché financier est accaparé par les demandes de l’Etat, il semble bien qu’une des premières formes à donner au protectionnisme consiste à offrir à l’armement national l’appui de l’État pour faciliter la réalisation d’un organisme de crédit destiné à procurer aux sociétés les fonds dont elles ont besoin afin de lancer de nouvelles commandes sur les chantiers français. Il est essentiel en outre de prendre des mesures urgentes pour donner de l’activité à cette industrie des constructions navales, très atteinte par le change et si