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Par cette lettre du 28 novembre 1857, le comte de Cavour, ministre des Affaires étrangères du roi de Sardaigne, entre en relations avec le prince Napoléon.


Le comte de Cavour au prince Napoléon.


A Turin, le 28 novembre 1857.

Monseigneur,

J’ai reçu avec une profonde reconnaissance, et j’ai lu avec un vif intérêt, le rapport sur l’Exposition de 1855 que Votre Altesse a présenté à l’Empereur [1] . J’ai été heureux d’y voir traitées, dans un sens aussi juste que libéral, plusieurs questions que j’ai travaillé à faire résoudre, dans mon pays, d’une manière conforme aux vues que Votre Altesse expose avec tant de courage et de netteté. Les enseignements remarquables que votre rapport renferme, fondés sur des faits d’une incontestable évidence, éclairés par une pratique qu’on peut dire universelle, auront une bien autre efficacité en France que les leçons du Collège de France, et contribueront puissamment au triomphe des saines doctrines que les préjugés et les intérêts égoïstes coalisés pour empêcher l’œuvre réformatrice entreprise par votre auguste cousin.

Je suis heureux de pouvoir dire à Votre Altesse que nous allons mettre en pratique l’opinion qu’elle émet sur les expositions universelles partielles. Une exposition nationale devant avoir lieu à Turin l’année prochaine, j’ai obtenu qu’on la rendit universelle pour ce qui a rapport aux soies. C’est là une application restreinte, mais telle que le comporte l’état de notre pays, des idées que vous développez d’une manière si lumineuse dans les considérations générales par lesquelles vous avez clos votre rapport. J’espère que les résultats que nous obtiendrons de cet essai, leur donneront une confirmation pratique. L’amour que Votre Altesse porte à la cause de la liberté, m’est un sûr garant de l’intérêt qu’elle aura pris aux élections qui viennent d’avoir lieu en Piémont. Le parti clérical, agissant dans l’ombre, mais avec un ensemble incroyable, suivant l’impulsion et la direction qui lui sont venues de Rome et du

  1. Rapport sur l’Exposition universelle de 1855, présenté à l’Empereur par Son Altesse Impériale le prince Napoléon, président de la Commission, Paris, 1857 ; in-4o de 511 pages.