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Aux mineurs George et Olga-Alexandrowitch Youriewsky, Nous accordons les droits qui appartiennent à la noblesse et Nous les élevons à la dignité de Prince avec le titre d’Altesse.

(Signé) : ALEXANDRE.

A Tsarskoïé-Sélo, le 11 juillet 1874.


Par cet ukaze, Alexandre II n’attribuait pas seulement à ses enfants un nom familial qui les rattachait, sous un voile transparent, à la grande lignée de leur mère : il leur assignait encore le prénom patronymique d’Alexandrowitch, qui était comme l’aveu officiel de sa paternité.


Quand l’imprudent Schouvalow s’était laissé aller à dire que désormais l’Empereur voyait tout par les yeux de sa maîtresse, il n’exagérait pas. Mais pour être plus exact, il aurait dû ajouter que la jeune femme, n’ayant qu’une personnalité faible, voyait toutes choses comme son amant les lui montrait et que c’est toujours sa propre vision qu’il retrouvait en elle.

Un fait suffirait à prouver comme il l’associait étroitement à sa vie politique.

L’année 1875 s’était ouverte sous de mauvais présages. Entre la France et l’Allemagne, un conflit semblait imminent. Alléguant quelques manifestations intempestives des évêques français à l’occasion du Kulturkampf, le prince de Bismarck nous accusait de vouloir troubler la paix du monde et de préparer une guerre de revanche. Les desseins, qu’il poursuivait par cette tactique diffamatoire, ne tardèrent plus à se révéler. Le prince Gortchakof, inquiet, fit parvenir à la Wilhelmstrasse des conseils de sagesse : la situation parut se détendre un peu. Mais bientôt la presse allemande reprit, de plus belle, sa campagne d’invectives contre la France. Alexandre II sentit alors que lui seul, par une intervention personnelle, pouvait maîtriser encore l’arrogance germanique ; il résolut donc d’aller conférer sans retard avec son oncle Guillaume.

Si courte que dût être son absence, si graves que fussent les intérêts qu’il allait débattre, si occupé qu’il serait nécessairement