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le territoire de la commune et non pas à une autre armée plus éloignée, campée sur le territoire d’une autre commune. Elle signifie ensuite que ce doit être un service nécessaire aux besoins de cette armée, ce qui exclut tout travail d’agrément ou dépense inutile.

La seconde condition établit que la réquisition ne peut être imposée que dans les limites de la force contributive du pays, c’est-à-dire sans arrêter la vie locale en tenant compte des besoins légitimes de la population, et, s’il s’agit de prestations, dans la mesure des forces et selon l’âge ou le sexe des réquisitionnés. La troisième condition, qui est la plus grave de toutes, est reconnue expressément par le code allemand des lois de la guerre continentale, en ces termes :


Le Gouvernement occupant ne peut rien exiger de l’habitant de ce qui apparaîtrait comme un crime contre sa propre patrie, ni comme une participation directe ou indirecte à la guerre.


En exposant la législation qui régit le droit de réquisition, nous entendons montrer que si l’exercice de ce droit est légitime en son principe, il a cependant des règles et des limites, qui n’ont jamais existé aux yeux de l’autorité militaire. Nous verrons, par l’examen de quelques faits, comment ces prescriptions ont été systématiquement violées, et notamment la troisième, qui a été la cause des plus dramatiques incidents, au cours de la lutte de nos populations envahies, contre l’oppression financière allemande.


Suivant le droit nouveau appliqué par l’armée occupante, les réquisitions se sont exercées sous deux formes : la prestation des objets à livrer par les habitants, et celle des travaux dont l’autorité allemande exigeait l’exécution. Disons tout de suite que celle distinction n’existait pas au point de vue du paiement, car, quelle que fût l’opération, ce n’était jamais l’Allemagne qui payait.

En effet, pour ces règlements, il était délivré aux intéressés des bons de réquisition, formant en quelque sorte des traites émises sur la Mairie, en laissant à celle-ci le soin de s’arranger avec les bénéficiaires ; dans certains cas, il n’était même donné par la Kommandantur qu’un simple accusé de réception, avec promesse de restitution. S’il y avait paiement en espèces,