Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 13.djvu/136

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En répondant à Desportes, Mme de Villeroy a fait preuve d’autant d’adresse que de grâce, et réussi à ne pas se montrer indigne de son interlocuteur dans ce périlleux dialogue. Qu’on en juge :


Berger tant ramply de finesse.
Contentez-vous d’estre inconstant,
Sans accuser vostre maistresse
D’un péché que vous aymez tant.
La nouveauté qui vous commande
Vous faict à toute heure changer :
Mais ce n’est pas perte fort grande
De perdre un amy si léger.

Si vous eussiez eu souvenance
De l’œil par le vostre adoré,
En despit de vostre inconstance
Constant vous fussiez demeuré.
Mais vous n’estiez à six pas d’elle
Que vostre cœur s’en retira.
Nous verrons, monsieur le fidelle,
Qui premier s’en repentira.

Ces pleurs et ces plaintes cuisantes
Dont tout le ciel elle enflammoit,
C’estoit des preuves suffisantes
Pour monstrer qu’elle vous aimoit.
Mais vous, plein d’inconstance extrême,
Oubliastes pleurs et amour.
Donc, si Rosette en faict de mesme,
Ce n’est qu’à beau jeu beau retour.

Ceste si constante et si belle
Que vos propos vont décevant,
S’elle arreste vostre cervelle
Peut aussy arrestes le vent.
Mais je ne porte point d’envie
Au bien que par vous elle aura :
C’est celle, je gaige ma vie,
Qui premier s’en repentira.


Une prompte réconciliation succéda à ces querelles en chansons. Madeleine de L’Aubespine déclara à son amant qu’elle s’étonnait qu’il ait pu qualifier d’inconstance l’attitude frivole