Page:Revue des Deux Mondes - 1923 - tome 13.djvu/127

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en rendant hommage sur la fin de sa vie au jeune talent de la châtelaine de Conflans, n’a pas été plus précis :


SONNET À MADAME DE VILLEROY

Madeleine, ostez moy ce nom de l’Aubespine,
Et prenez en sa place et Palmes et Lauriers,
Qui croissent sur Parnasse en verdeur les premiers,
Dignes de prendre en vous et tiges et racine.

Chef couronné d’honneur, rare et chaste poitrine,
Où naissent les vertus et les arts à milliers,
Et les dons d’Apollon qui vous sont familiers,
Si bien que rien de vous, que vous-mesme n’est digne,

Je suis en vous voyant heureux et malheureux :
Heureux de voir vos vers, ouvrage généreux :
Et malheureux de voir ma Muse qui se couche

Dessous vostre Orient. O saint germe nouveau
De Pallas, prenez cueur : les Sœurs n’ont assez d’eau
Sur le mont d’Hélicon pour laver vostre bouche.


On retrouve encore le nom de Mme de Villeroy en tête de l’une des Pierres précieuses de Rémi Belleau et des épitaphes, dignes d’un plus grand personnage, [que Ronsard, Desportes, Jamyn et Passerat rimèrent en 1576 pour une petite barbiche blanche (fort aimée de Madeleine de L’Aubespine. Mais rien, dans ses divers poèmes, ne permet de fixer, même vaguement, la physionomie de notre femme de lettres. Quoi d’étonnant, dans ces conditions, a ce que son souvenir se soit, avec le temps, effacé ?


I

Si Madeleine de L’Aubespine n’a rien publié sous son nom, il existe néanmoins une pièce imprimée d’elle en tête des Premières œuvres de Desportes, et cette pièce, oubliée jusqu’à ce jour au point d’être à peu près inconnue, la voici :


SUR LES AMOURS DE PH. DESPORTES
SONNET

Qu’eusses-tu fait, Amour ? ta flamme estoit esteinte.
Ton arc, vaincu du temps, s’en alloit tout usé,