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par un vote populaire, si le territoire des provinces susdites reste définitivement sous la domination et souveraineté du Chili, ou s’il continue à faire partie du territoire péruvien. Celui des deux pays auquel demeureront annexées les provinces de Tacna et Arica paiera à l’autre dix millions de pesos... » Un protocole spécial devait établir la forme du plébiscite et les conditions de paiement de l’indemnité prévue.


Tel est l’article III du traité d’Ancon qui crée toute la question du Pacifique. Dès sa signature, l’armée chilienne évacua Lima, et les dernières troupes quittèrent le Callao à la ratification. Pendant plus de deux ans et demi, la domination étrangère avait pesé lourdement sur le territoire envahi, et la capitale en particulier, la ville des Rois, avait souffert matériellement et moralement sous la rude main de l’amiral Lynch, qui avait remplacé le général Baquedano dans le commandement de l’armée d’occupation. Elle avait payé de lourdes contributions de guerre ; ses bibliothèques publiques et ses œuvres d’art avaient été saisies et transportées au Chili ; son Université, — la plus ancienne des deux Amériques, — et tous ses établissements d’instruction avaient été transformés en casernes. Le souvenir de tous ces maux, en partie évitables, et même celui des exécutions militaires dont toute la région envahie avait souffert, serait sans doute bien atténué par le temps dans la mémoire de populations aimables et policées, qui paraissent vivre beaucoup au jour le jour. Mais une plaie reste toujours ouverte dont la douleur réveille toutes les autres : la marche du temps, au lieu d’apporter l’oubli, ne fait que compliquer de plus en plus la solution du problème.

D’abord, le Chili élargit le démembrement résultant du traité en continuant à occuper la petite province du Tarata, au Nord de Tacna, et il la conserva malgré les protestations du Pérou. Puis le protocole qui, d’après le traité d’Ancon, devait régler les conditions du plébiscite et le paiement de l’indemnité ne fut jamais établi.

Le 26 janvier 1894, un texte rédigé d’un commun accord par des plénipotentiaires autorisés fut admis par le Gouvernement péruvien, et le Gouvernement chilien lui refusa son assentiment, malgré l’avis de son représentant. En 1895, après avoir