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conquête et fixait les frontières des divers États selon celle des colonies espagnoles dont ils étaient sortis, conformément aux traditions des libérateurs Bolivar et San Martin. Ils réclamèrent l’arbitrage des États-Unis ; mais le Chili se refusait à admettre que ses droits de conquête pussent être discutés par quiconque, et le représentant des États-Unis déclara qu’il n’était pas dans les intentions de son Gouvernement de s’ériger en juge de la querelle, mais seulement d’essayer un rapprochement loyal entre les belligérants, et la conférence se termina sans résultat.

Un nouvel effort s’imposait donc au Gouvernement chilien. Il s’y était préparé. Un corps expéditionnaire d’environ 27 000 combattants était prêt à s’embarquer à Arica : les provinces conquises restaient gardées par 6 000 hommes et 10 000 hommes achevaient leur instruction au Chili, formant la réserve. Les bataillons, presque constamment victorieux, gardaient leurs cadres depuis plus d’un an et pouvaient remplacer leurs pertes sans perdre leur cohésion. Les régiments de nouvelle formation, après une période d’instruction au Chili, allaient s’entraîner au camp d’Arica où ils retrouvaient des anciens justement fiers de leurs succès. Les troupes chiliennes avaient pris toute la valeur d’une armée régulière, pendant que les troupes péruviennes de nouvelle formation s’en éloignaient de plus en plus. Le peuple et l’armée du Chili réclamaient depuis plusieurs mois la marche sur Lima ; l’annonce du départ pour la capitale du Pérou fut accueillie à Arica avec le plus grand enthousiasme.

La première division (8 600 hommes commandés par le général Villagran) s’embarqua le 15 novembre sur deux vapeurs et sept voiliers protégés par deux navires de guerre et, sans rencontrer de résistance, débarqua à Paracas, petit port situé à 20 kilomètres de Pisco, qui fut évacué sans coup férir. Le reste de l’armée débarqua le 22 décembre, plus au Nord, dans la rade ouverte de Curayaço, à 90 kilomètres au Sud de Lima, et une brigade s’avança rapidement jusqu’au Lurin, dont la vallée fertile se prêtait admirablement à la concentration du corps expéditionnaire destiné à opérer contre Lima, dont il n’était qu’à environ 30 kilomètres.

La première division Villagran débarquée à Pisco avait l’ordre de rejoindre l’armée par voie de terre et la première brigade, sous les ordres du capitaine de vaisseau Patrick Lynch,