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suprême ; Cacerès, Suarez, Davila, Canevaro, Iglesias avaient fait leurs preuves dans les précédents combats. Mais l’intermédiaire manquait, le cadre subalterne qui, instruit pendant la paix ou bien né de la guerre, aurait pu former des soldats avec les paisibles citoyens que le salut de la patrie appelait sous les drapeaux.

Cependant le blocus du Callao se maintenait rigoureusement ; grâce à la portée de son artillerie, la flotte chilienne pouvait bombarder impunément les navires en rade, le port et la ville, tout en restant à l’abri des pièces péruviennes. Pourtant, en saisissant de petites embarcations qui portaient des torpilles, deux navires chiliens furent détruits. Sous le commandement du capitaine de vaisseau Lynch, en septembre, une expédition alla promener le pavillon chilien jusque dans les ports les plus septentrionaux du Pérou ; 2 600 hommes étaient embarqués sur des transports et prirent terre à plusieurs reprises pour pénétrer dans l’intérieur du pays où aucune défense n’était organisée. De lourdes contributions de guerre et la saisie des marchandises rendirent l’opération très profitable ; elle fut accompagnée de destructions inutiles.

Le Pérou fit de vaines tentatives pour décider la République argentine à intervenir dans le conflit, soit les armes à la main, soit en prenant vis à vis du Chili une attitude menaçante. Dans le même objet, il renoua les relations diplomatiques avec l’Espagne, mais n’obtint aucun secours effectif. Les États-Unis s’étaient également récusés, mais offraient leurs bons offices pour servir d’intermédiaires pacifiques.

Après bien des tergiversations et l’intervention de la France, de l’Angleterre et de l’Italie, ces propositions furent adoptées et les plénipotentiaires des trois républiques belligérantes se réunirent dans la rade d’Arica, à bord de la corvette nord-américaine Lackawanna, le 22 octobre 1880. Les conditions de paix proposées par le Chili étaient très dures : il exigeait l’annexion de toute la côte bolivienne et de la province péruvienne de Tarapaca, 20 millions de piastres (100 millions de francs) comme indemnité de guerre, et l’occupation de Tacna et Arica jusqu’à complet paiement et jusqu’à l’exécution d’autres conditions. Les représentants du Pérou et de la Bolivie repoussèrent formellement toute cession de territoire. Ils admettaient que le droit public américain interdisait toute