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Campero était un caractère modéré et plein de sang-froid, un esprit cultivé, il avait suivi les cours de l’École des mines à Paris et avait représenté son pays en Angleterre et en France ; il montra de véritables qualités militaires. Mais au cas particulier, il adopta un peu trop vite le plan de son subordonné bolivien, et le 27 avril se mit en route pour Sama. Mais le gros de ses colonnes n’avait pas fait deux lieues qu’elles furent obligées de s’arrêter : les convois indispensables et le parc d’artillerie ne suivaient pas, faute d’équipages. Il ignorait tout de l’ennemi. La cavalerie chilienne, par des charges heureuses, avait pris l’ascendant sur les Alliés qui avaient renoncé aux reconnaissances ; d’autre part, le service de renseignements n’avait pas été organisé, el les improvisations en pareille matière sont inopérantes.

L’armée alliée était belle et donnait grande confiance à son nouveau chef, ainsi qu’en témoigne son rapport au Parlement bolivien. Il avait pu rassembler quelques renforts, et 1 500 hommes arrivèrent facilement à Tacna, mais des démonstrations faites par les Chiliens sur la frontière arrêtèrent le reste des forces qui avaient été préparées. Les Alliés disposaient au total de 9 300 hommes, dont 2 000 défendant Arica. Le général Campero, qui n’avait par conséquent qu’environ 7 300 hommes sous ses ordres, renonça à tout mouvement en avant, et choisit en avant de Tacna une excellente position pour y arrêter l’ennemi ; un étroit plateau assez élevé, de forme légèrement convexe vers l’ennemi, avait sur ses flancs des ravins sablonneux, impropres aux charges de cette cavalerie chilienne dont l’action devenait une hantise ; c’est là qu’il se fortifia, assez sommairement, semble-t-il ; chacun de ses soldats avait reçu un sac à terre, et trois redoutes épaulaient la droite et le centre des Alliés.

Le 22 mai, une reconnaissance en force vint tâter sa position et put l’étudier à loisir ; dépourvus de toute cavalerie efficace, les Alliés ne gardèrent pas le contact. Après avoir traversé la zone désertique, l’armée chilienne était arrivée sur le Sama, où Campero avait projeté de la devancer, et s’y refaisait tranquillement, à six lieues de l’ennemi.

Le 25 mai, elle campait à deux lieues des Alliés. Le général Campero eut l’idée soudaine de l’attaquer par surprise, et se mit en marche à minuit, dans le plus grand ordre. Mais ses colonnes, mal guidées et dépourvues de boussoles, s’égarèrent dans le