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tout une intervention armée en Russie avec l’appui de la France et de la Pologne ; personne en réalité n’y songe ; mais c’est un prétexte pour maintenir et renforcer l’armée rouge, soutien indispensable du régime soviétique. S’il y a, en Europe, une Puissance militariste, et qui menace ses voisins, depuis l’Inde jusqu’à la Pologne et la Roumanie, c’est certainement la Russie bolchéviste ; c’est elle qui est l’inquiétude de l’Europe. Raison de plus, pour les Russes et les Allemands, pour faire croire que c’est la France et pour lier le désarmement de la Russie à celui de la France et de la Belgique. Il appartiendra à nos représentants de faire ressortir la différence profonde qui sépare les deux problèmes.

L’armée française, comme M. Maginot, ministre de la guerre, et le Président du Conseil lui-même, l’ont fortement montré après le colonel Fabry rapporteur, et le général de Castelnau, président de la Commission de l’armée, doit rester prête à toute éventualité en face d’une Allemagne qui garde une armée active de 250 000 hommes et qui peut mobiliser en peu de jours des millions de réservistes ou de jeunes recrues exercées dans les organisations de police et les sociétés sportives ; elle doit veiller à la tranquillité de nos colonies travaillées par les agents bolchévistes et turcs ; elle est enfin le seul moyen dont nous puissions disposer, s’il devenait nécessaire d’exercer sur l’Allemagne une pression pour obtenir les réparations auxquelles le Traité nous donne droit. L’armée de la France ne menace personne, mais sa force est le fondement solide, et qui doit rester inébranlable, de la sécurité et de la paix. C’est pour cela qu’en Europe et en France même, tous les pêcheurs en eau trouble, tous ceux qui ont intérêt à saper l’ordre politique et l’ordre social en réclament la réduction et en souhaitent la disparition.

Dans ces conditions, on s’explique mal pourquoi, à la Chambre, la presque unanimité qui a approuvé, le 3, les déclarations du Gouvernement, ne s’est pas, le 7, retrouvée derrière lui pour voter le service de dix-huit mois, que, d’accord avec les chefs de l’armée, il demandait au Parlement. La majorité n’a été que de 83 voix. Le Gouvernement n’avait pas soutenu, cependant, qu’il ne fût pas possible d’arriver au service d’un an, lorsque la situation générale de l’Europe, le désarmement matériel et moral de l’Allemagne et l’exécution des traités le permettraient ; de leur côté, MM. Ossola et Molinié, auteurs du contre-projet sur lequel a eu lieu le vote décisif, demandaient le service d’un an, mais admettaient, pendant trois ou quatre ans, une période transitoire durant laquelle les classes appelées feraient dix