Page:Revue des Deux Mondes - 1922 - tome 8.djvu/921

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

liées par une tradition séculaire. Toute entreprise dirigée contre la religion catholique en Orient a l’apparence d’être dirigée du même coup contre la France. A Constantinople et à Ismid, comme à Smyrne, à Eski-Chéhir et à Angora, les écoles catholiques sont, en grande majorité, des écoles françaises. Et, si mes informations sont exactes, nos missionnaires n’ont pas à se louer de la façon dont les Hellènes se sont comportés vis-à-vis d’eux en Asie-Mineure, en Macédoine et en Thrace.

« A Andrinople, nous avions cinq écoles avec 1 200 élèves ; aujourd’hui les trois que nous avons pu rouvrir comptent ensemble 180 enfants, dont les parents sont soumis par les autorités helléniques à toute sorte de vexations. A Enidgé-Vardar, les Filles de la Charité, religieuses françaises, avaient ouvert une petite école, où les enfants accoururent en grand nombre : le maire grec de la localité, s’armant d’une loi inconnue, obligea les familles de ces enfants à les envoyer à l’école orthodoxe ou à payer une amende. A Salonique, les journaux grecs officieux dénoncent à grand fracas une mensongère « conspiration de prêtres catholiques » : les prêtres incriminés sont tous des Français. A Eski-Chéhir, les troupes de Papoulas occupent sans réquisition régulière l’église et l’école françaises. A Brousse, il y a quelques jours (le 6 août), le père Claudien, supérieur des Assomptionnistes et directeur du Collège français, est arrêté sans motif par des gendarmes grecs et conduit comme un criminel, entre quatre baïonnettes, jusqu’au poste de police, pour être relâché quelques heures après. Un nationalisme exaspéré, les passions ordinairement déchaînées par la guerre expliquent peut-être ces incidents ; mais vous ne serez pas étonnés qu’ils aient produit en France, et non seulement dans les milieux catholiques, une fâcheuse impression. Comment ne pas nous émouvoir, en voyant que partout où les Grecs avancent en Orient, notre influence est mise en échec et nos œuvres sont compromises ?

— Voilà bien l’erreur de la France, de croire qu’elle doit son immense influence dans le Levant à ses œuvres religieuses ! Mais il n’en est rien ; c’est un tout petit côté de la question, — et M. K... mettait dans ses paroles une animation extraordinaire. Tous, tant que nous sommes ici, nous pensons en français, nous parlons le français comme notre langue naturelle. Croyez-vous que nous l’ayons appris dans vos écoles religieuses ? nullement,