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LA QUESTION TURQUE

IV [1]
LES MINORITÉS NON-MUSULMANES
EN TURQUIE

Le grand malheur de la Turquie est d’être un pays peuplé de races très nombreuses et très différentes : la population turque s’y trouve mélangée à peu près partout, dans des proportions variables, à des éléments hétérogènes, qu’elle n’assimilera jamais, pas plus qu’elle ne se laissera assimiler par eux. Si l’on observe la façon dont vivent côte à côte dans l’Empire ottoman, les Turcs, les Juifs, les Grecs et les Arméniens, on constate que tout les divise et que rien ne les unit ; depuis la religion et la langue, jusqu’aux mœurs et au costume. Chaque nation, comme on dit en Orient, garde jalousement son caractère singulier et ses traditions ethniques ; et, ce qui est plus grave, chaque nation est parvenue, fort aisément, grâce à la tolérance ou à l’indifférence des Turcs, à se constituer pratiquement en État, avec son organisation particulière, sa juridiction spéciale, son clergé, ses écoles, on pourrait même dire ses finances.

Ce n’est pas ici le lieu d’expliquer en détail comment cet état de choses a pu naître et subsister. On rappellera simplement, pour mieux faire comprendre les termes dans lesquels se pose aujourd’hui en Turquie la question des minorités, le

  1. Voyez la Revue des 15 janvier, 1er février et 1er mars 1922.