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champs de bataille de France et d’Orient fortifiait les courants ; qui, depuis quatre-vingts ans, dans la première de ces Églises, tendaient à remettre en honneur certaines richesses spirituelles disgraciées par le XVIe siècle. L’English Church Union, grande ligue anglicane qui fut spécialement fondée, il y a plus d’un demi-siècle, pour le retour aux anciens rites, compte actuellement, parmi ses 40 000 membres, 20 évêques et plus de 4 000 pasteurs ; voilà longtemps déjà que, dans cette Union, beaucoup d’âmes pieuses souhaitaient que le corps eucharistique du Christ pût être gardé dans le tabernacle et que les fidèles fussent sans cesse admis à venir l’adorer. Usage romain ! grondaient les stricts partisans des disciplines protestantes ; ils se révoltaient, s’indignaient, conjuraient les autorités suprêmes que défense fût faite aux fidèles de faire acte d’adorateurs devant le tabernacle. Mais dans les terres où sévissait la mort, les ministres anglicans attachés aux armées voyaient cheminer le Christ eucharistique, porté par les aumôniers « romains ; » ils le voyaient se rapprocher de l’humanité souffrante, la faire venir vers lui, aller à elle ; et beaucoup d’entre eux pressentaient qu’aux heures tragiques cette active familiarité d’une vie divine qui venait s’offrir pouvait procurer un réconfort. Il leur semblait que, décidément, dans leur Eglise, l’Eucharistie et la foule fidèle étaient trop loin l’une de l’autre. Leurs impressions se répercutaient, se propageaient, faisaient école.

Il y eut un millier de clergymen au début de 1917, dans la province ecclésiastique de Cantorbéry, pour s’opposer à ce que des mesures fussent prises contre les ministres du culte qui gardaient les espèces saintes dans les ciboires et qui convoquaient les fidèles à venir adorer. Le conseil supérieur des évêques persistait à vouloir sévir : « L’Église d’Angleterre, affirmaient-ils, ne permet la réserve eucharistique d’aucune manière. » Fallait-il donc revenir, désormais, aux procédures compliquées et très exceptionnelles que prévoyait le Prayer Book pour la communion des malades ? Impossible, avouait l’évêque d’Exeter ; et déjà, faisant une première brèche dans la décision de principe prise par le conseil supérieur épiscopal, il se montrait enclin à permettre de conserver les saintes espèces, non seulement en vue de la communion des malades, mais en vue de l’adoration privée. Il y a dans ma ville épiscopale, constatait l’évêque de Birmingham, une douzaine d’églises anglicanes où