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en automobile ; mais ces autos n’ont pas toujours pu vaincre le terrain. Le reg dur, en particulier, déconcerte, parfois roc, parfois simple croûte qu’effondrent les voitures. Mais le général ne manque pas de décision. « Si l’on va vite et si l’on a soin de ne pas passer dans des ornières déjà faites, on passe. » Quand l’impossibilité de passer est absolue, quand on n’a pas pu jalonner la piste, on s’installe et on travaille. On crée ou l’on améliore. Ainsi, le système, c’est de construire des pistes avec le concours d’autos, à l’aide de chantiers mobiles ; et, lorsqu’elles sont construites, d’y veiller et d’en prendre soin. Les conducteurs ne prennent pas tant de précautions.

L’œuvre terminée, il l’apprécie, avec modestie, comme toujours. « Le travail est loin d’être parfait. » C’est son expression favorite ; il dit pour la T. S. F. : « Les résultats ne sont pas encore satisfaisants. » Mais il n’en constate pas moins les résultats qui nous paraissent, à nous, impressionnants. « Actuellement, il y a au Sahara 2 400 kilomètres de pistes praticables et parcourues, 420 kilomètres de non encore parcourues, 150 ensablées sur dix kilomètres, 820 en construction et reconnues par des autos que des corvées ont fait passer, 550 en projets. » Que n’ajoute-t-il que toutes les études qui concernent les pistes inexploitées sont au point ? Car, moins d’un an après le départ du général, le commandant Sigonney signale qu’une piste de 3 000 kilomètres va de Touggourt, terminus de la voie ferrée, à Tin Zaouaten, poste formant limite entre l’Algérie et l’Afrique occidentale française. Le général a souvent passé et beaucoup jalonné.

Il ne s’est pas borné là. Il a renouvelé ses expériences automobiles. Elles n’ont pas toujours été concluantes ni convaincantes ; ne le reconnaîtra-t-il pas lui-même ? Certes, le colonel Dinaux a raison de déclarer que « les insoumis ne sont pas profondément impressionnés et constatent, comme nous, les échecs, les imperfections et le faible rendement d’une œuvre qui est à peine ébauchée. » Mais il se plaît à conclure qu’une grande œuvre a été accomplie au Sahara depuis 1916 ; et le général Lucotte appuie cette conclusion de sa haute compétence, en ajoutant : « Il faut poursuivre cette œuvre avec des procédés méthodiques, c’est-à-dire avec un plan de travail et d’emploi s’étendant à plusieurs exercices. »

Tel était bien l’esprit avec lequel procédait le général Laperrine,