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Je m’embarquerai le 10 à Marseille, pour l’Egypte. Je vais passer cinq ou six semaines au poste de travail que les hasards de la vie m’ont assigné à Ismaïlia [1]. Les inspections de chantiers et de bassins ne me laisseront que peu de loisirs pour inspecter mes vieux Pharaons.

Je serai de retour vers la fin de février.

Les corvées et les obligations en retard me pressent à ce point que je ne pourrai, comme je l’eusse voulu, quitter Paris avec un ou deux jours de liberté devant moi, pour m’arrêter à Avignon et à Arles. Le rapide du 9 me conduira droit au bateau du 10. Mais j’espère être plus heureux au retour et vous redire de vive voix, à vous et à Mme de Pontmartin, tout ce que je mets ici de vœux affectueux.

Norddeutscher Lloyd.

Bremen.


Dampfer Zîelen. Rade de Naples. 23 février 1908.

Mon cher ami,

Ce ne sera pas encore pour cette fois, hélas ! Une combinaison opportune de bateaux me donnait la facilité de passer trois jours à Rome avant de rentrer à Paris, où je dois être le 1er mars ; je reviens donc par les routes cisalpines, Modane au lieu de Marseille. Mais le Zieten ne devant débarquer ses passagers que demain matin, ma combinaison aboutit à ce paradoxe ridicule : aller chercher à Naples ses soixante ans ! O Graziella ! qu’en diriez-vous ? Après-demain j’irai offrir cette croix au Seigneur sur les dalles de Saint-Louis-des-Français, à la place où Chateaubriand geignait sur la même fâcheuse aventure. Certes, il eût été plus conséquent, plus géométrique, de fermer le circuit à l’un des points de départ de ma vie, aux Angles ; et cette tuile fût tombée plus doucement de votre toit. Mais Ulysse vagabonde à la merci des vents. Je pourrais rendre des points à ce touriste classique ; dans ces derniers quinze jours ou m’a vu à l’Opéra du Caire, dans les tombeaux des rois à Louxor et dans la salle hypostyle à Karnak, sur le canal à Ismaïlia, à Port-Saïd où je me suis embarqué jeudi pour Naples et Rome. Je vais retrouver mes pantoufles rue de Varenne.

Si j’en sors, comme il est probable, pour une course en

  1. E.-M. de Vogué était administrateur de la Compagnie du Canal de Suez.