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l’avenir et rattacher plus étroitement sa colonie à la France. Ceux qui ont combattu cette politique, en 1891 [1], redoutaient les réactions qu’elle devait engendrer, et ils avaient adopté comme formule : « ni assimilation, ni autonomie, » pour indiquer que c’était par un régime de libertés locales fortement entouré de garanties que la Métropole pourrait, peu à peu, conduire l’Algérie à prendre ses destinées en mains, sous l’égide tutélaire de la France.

Les illusions des uns, les ambitions des autres n’ont pas permis à cette prudente méthode de se développer et aujourd’hui, après le bouleversement de la guerre, on sent que l’importance de l’Algérie pour la France n’a fait que grandir. Aussi nous appartient-il d’éviter dans notre grande colonie les heurts, les imprudences en concédant à nos compatriotes algériens la part d’autonomie conforme à la situation géographique du pays. Accordons-leur les libertés administratives, financières, indispensables, qu’ils réclament : c’est une question de temps, au reste, pour qu’ils les obtiennent ; ils repoussent à cet égard toute centralisation exagérée de la Métropole, c’est ainsi que logiquement ils s’opposent à un ministère de l’Algérie et de l’Afrique du Nord ou bien à un rattachement à celui des Colonies.

On n’a pas toujours en France le sens des réalités ; écoutons nos colons algériens, ils le possèdent au plus haut degré. A cet égard, débarrassons-nous de cette idéologie qui nous fait tant de torts ; elle n’a pas été sans influencer la naissance de la loi de 1919, mauvaise fée que nous avons introduite au chevet de la colonie, plus démagogique que libérale, elle risque de livrer la population indigène à l’avide tyrannie de quelques aventuriers politiques qui nous prépareraient, si nous n’avisions, un très sombre avenir

En politique indigène, il y a une belle formule, celle du général Laperrine, vieil Africain ; pourquoi ne pas nous y tenir : « Ni humilier, ni exploiter l’indigène ; se le concilier, en le faisant entrer comme collaborateur sincère dans une France prolongée à la grandeur de laquelle il participera. »

A nous, par une propagande judicieuse, de mettre en lumière l’œuvre de la France, celle-ci ayant donné, à un titre et sous des modalités dissemblables en Algérie et dans les protectorats

  1. Jules Cambon, loc. cit.