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s’emparera, soyons-en convaincus, de toutes les armes qu’il trouvera. Le souvenir des luttes religieuses du Donatisme qui ravagèrent l’Afrique du Nord aux premiers siècles du Christianisme porte à la réflexion, car le succès de ce schisme provenait, en grande partie, de l’ardeur des Berbères à embrasser une cause qui, en fait, était bien plus la révolte de leur indépendance contre le pouvoir central de Rome. C’est ainsi que de nos jours la propagande d’un communisme plus ou moins frotté de bolchévisme sera utilisée et qu’elle aura sur les esprits une large influence, dans la mesure où elle respectera l’intérêt islamique. Pour s’en convaincre, il n’y a qu’à connaître les étroites relations que quelques-uns des chefs du parti indigène d’opposition entretiennent avec nos communistes les plus notoires, plusieurs de ces derniers ayant, du reste, collaboré à la Tunisie martyre, ce livre empoisonné du parti « Jeune Tunisien. »

L’un des phénomènes les plus caractéristiques de notre époque est assurément la propagande qui exploite les revendications musulmanes. Celles-ci, grossies par des meneurs tour à tour européens ou indigènes, servent l’astucieuse campagne poursuivie dans la Métropole ; pour donner le change à l’opinion parlementaire : ces meneurs sont habiles à cultiver les ambitions et les rancunes sous le couvert de la religion. Nous voyons, ainsi que me le disait l’un des fonctionnaires les plus avertis du Protectorat à Tunis, qu’un certain panislamisme, bassement démagogique, ressemble étrangement au bolchévisme.

Quoique la masse indigène ne soit pas encore entamée, il est temps d’envisager les mesures capables de sauvegarder nos populations. N’a-t-on pas surpris dans les écoles indigènes de Kabylie des tracts d’adhésion à la IIIe Internationale de Moscou, imprimés à Marseille et qui faisaient l’éloge de Lénine, de son gouvernement et de ses conceptions, tandis qu’un instituteur en congé, à Bône, signait des affiches d’une rare violence contre le Président du conseil Millerand, après la victoire, et que, précédemment, un employé des postes d’Oran avait eu l’audace d’organiser une conférence contre l’emprunt de la Défense nationale ? Enfin, les dockers indigènes du même port entraient en grève pour protester contre la politique du Gouvernement français à l’égard de la République des soviets, et, à Clairefontaine, dans le département de Constantine, des cheminots indigènes préparaient sur la voie ferrée, suivant toutes les règles