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reconstruire, mais en utilisant, pour ce travail nouveau, les matériaux anciens. Ce serait mal connaître l’Allemagne que de croire qu’elle s’avouera vaincue sur aucun terrain et à aucun moment de son histoire. Plus que jamais, elle a besoin de reprendre sa marche en avant et de poursuivre, vers l’Est, son expansion, que heurte, en d’autres points, la concurrence anglaise, américaine ou française. Sur le vaste territoire russe, sa position géographique lui crée une situation privilégiée, sa connaissance du pays lui donne une avance considérable, son change déprécié intervient comme un élément favorable d’exportation. Aussi, toute sa puissance d’organisation étant prête à entrer en action, l’Allemagne se prépare-t-elle à miser de nouveau sur le tableau russe, et c’est pourquoi il est intéressant de savoir, avec les éléments que nous possédons actuellement, comment elle va engager sa partie devant la Conférence de Gênes.


III. —REPRISE DES RELATIONS RUSSO-ALLEMANDES

Sur la situation actuelle de la Russie, que nul mieux qu’elle ne connait, l’Allemagne n’a pas d’illusions. Elle sait que la capacité d’achat de l’Etat soviétique est en voie d’épuisement, puisqu’il n’y a plus de ressources disponibles au fond de la caisse de l’ancienne Banque de l’Etat russe, qui contenait encore plus de trois milliards de roubles en or, à la fin du Gouvernement impérial, soit 8 milliards de francs. Il n’y a donc rien à tirer, pour le présent, au profit de son expansion commerciale. Quant à faire des opérations avec la Russie sur la base des crédits à long terme, l’Allemagne n’y est nullement opposée, puisque tout son fonctionnement bancaire se prête admirablement à cette collaboration avec le commerce d’exportation, mais il faut préalablement créer une nouvelle organisation de crédit sur les ruines de l’ancien ordre de choses et établir un système de garanties et de contrôle, au risque de porter atteinte à l’indépendance des Soviets, et c’est là un rôle difficile à jouer, dont elle préfère laisser la charge aux Puissances de l’Entente. Quand l’organisme sera en voie de fonctionnement, l’Allemagne ne sera pas la dernière à s’en servir, avec les immenses avantages que lui donnera sa longue préparation.

En somme, la question se pose aujourd’hui dansées termes : l’Allemagne officielle comprend parfaitement qu’elle ne saurait