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mais ils étaient tellement butés que je n’insistai pas » Il n’est pas buté, lui, mais patient, persévérant, parce qu’il sait qu’il finira par avoir raison.

Ainsi s’explique son succès auprès des indigènes. « Vis-à-vis d’eux, il recommandait la justice et la patience ; il voulait qu’on ne les taquinât point par des coups d’épingle. » Ce sont des procédés auxquels les indigènes étaient trop peu habitués pour ne pas s’y montrer sensibles. Le général ne s’émeut-il pas de ce que « des officiers nerveux et incompétents, par des négligences ou des mesures arbitraires, les ont mis en défiance » pendant son séjour en France ? Avec lui, rien de pareil à redouter. « A In-Salah, les chefs indigènes que je connaissais depuis 1901 et qui avaient leur franc-parler avec moi firent appel à ma loyauté. » Quelle belle et noble figure de Français colonisateur que celle de ce général avec qui les indigènes ont leur franc-parler et à la loyauté duquel il savent qu’ils ne sauraient s’adresser en vain ! Et quels concours dévoués ils s’empresseront, ils seront heureux de lui fournir ! « Je dis aux chefs indigènes et à leurs Djemaa que j’avais toujours confiance en eux et que si, par malheur, la situation devenait plus critique, je comptais sur les populations que j’armerais pour nous aider à nous maintenir au Tidikelt. »

La confiance, voilà son grand mot lâché. Il prouve par ses actes quelle valeur le mot prend sur ses lèvres. Est-ce qu’on ne s’est pas imaginé, par défiance pour les populations du Touat, de leur défendre de posséder de la poudre, et ne leur a-t-on pas ordonné, par surcroit de précautions, de maintenir une brèche à leurs casbahs ? Le général sent monter en lui l’indignation. « Cela ne les rend-il pas incapables de résister à un rezzou, cela ne leur permet-il pas de dire qu’ils ont dû s’incliner et le ravitailler ? C’est inhumain et maladroit. » Entendez-vous ces deux mots ? « Inhumain » part du cœur ; la raison dicte « maladroit. » Ce général est une pensée et un cœur.

D’ailleurs, incapable de faiblesse, il sait garder en tout la mesure qui convient Les Azgueurs (Ajjers, Azjers et Azgueurs, c’est tout un) se sont-ils révoltés ? La révolte sera réprimée. Mais il importe que les rebelles « se rendent compte que nous sommes disposés à pardonner, à des conditions pas trop draconiennes. » La joie du général est immense lorsqu’au retour de la colonne Vitaud, il peut écrire : « (Cette expédition a été une véritable campagne d’apprivoisement et de remise en confiance