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colonel Venal, qui commandait le territoire militaire du Niger, les questions pendantes entre les territoires des deux grandes colonies et détermina la limite des zones d’action des troupes algéro-sahariennes et des troupes soudanaises. Puis, « sûr que sa politique serait suivie et lui survivrait, » il accepta un poste dans les troupes métropolitaines ; avant de le rejoindre, il exécuta sa randonnée d’adieu. Une dernière fois, en 1910, il visita le Hoggar et le pays Ajjer. Il rassembla les Touareg en un grand palabre, sonda leurs cœurs et leurs reins, sentit qu’ils étaient bien en main, régla les derniers litiges au mieux de leurs désirs, leur donna ses derniers conseils. Ce fils de France salua avec émotion ses « chers Hoggars » dont sa politique habile avait fait des fils adoptifs de la mère patrie. Alors, l’esprit tranquille, il partit prendre à Lunéville le commandement du 18e chasseurs à cheval. Les officiers sahariens étaient munis de l’outil qu’il avait forgé, les « compagnies sahariennes ; » ils étaient imprégnés de son esprit, de sa méthode, de sa doctrine.

Pendant que le colonel Laperrine commandait successivement les chasseurs de Lunéville et la brigade des dragons de Lyon, les compagnies sahariennes remplissaient brillamment leur tâche, sur une immense étendue, toujours désertique, souvent inexplorée, procédant tour à tour, suivant les nécessités, à des opérations de police, de répression ou de conquête. Rien ne les arrêtait, ni les difficultés matérielles, ni les distances, bien que parfois elles dussent pousser jusqu’à plus de mille kilomètres de leur base de ravitaillement. Méthodiquement, sûrement, l’immense domaine saharien était soumis et organisé ; les « élèves » du colonel, ainsi qu’aiment à s’appeler les officiers formés à son école, se montraient dignes du maître.


LE FRONT DU SAHARA PENDANT LA GRANDE GUERRE

En août 1914, le coup de tonnerre de la déclaration de la guerre par le Gouvernement allemand eut son retentissement au Sahara. Les officiers, d’un même élan, réclamèrent l’honneur d’aller combattre sur le front de France où combattrait leur ancien chef. Après réflexion, ils se rendirent compte qu’une lutte âpre et incessante n’allait pas tarder à s’engager sur le front saharien ; c’est là que le devoir les fixait.

Pourtant, jusqu’en décembre, si la révolte couvait, on ne