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Il s’était entouré de conseils, s’adressant à tous ceux qui pouvaient lui fournir un concours éclairé. Adolphe Chéruel, le comte de Circourt, MM. Tiby et de Cherrier se voient ainsi consultés à diverses reprises et leurs suggestions sont le plus souvent écoutées et suivies. « Suivant mon vieil usage de déférer sans retard aux observations qui me sont faites, écrit-il au premier, je m’occupe en ce moment d’un nouveau paragraphe qui remplira le vide que vous avez très justement signalé pour le XVIe siècle ; je reverrai aussi avec scrupule ce que j’ai dit sur la Fronde [1]. »

Il s’adresse d’autre part à Renan pour des corrections de détail particulièrement délicates : « Mon cher philosophe un peu trop sceptique, voudriez-vous chercher dans les bonnes feuilles que je vous adresse, fin du chapitre VIII, un paragraphe sur le Jansénisme qui a grand besoin d’amendement. La définition de la doctrine y est peu exacte et fort peu claire et de plus la phrase est boiteuse grammaticalement. Vous me rendriez un véritable service en m’aidant à faire cette correction. Voyez ce dont il s’agit et substituez à ce qui est, quelque chose de mieux dont nous causerons ensuite. »

Enfin, à la veille d’envoyer chez Furne son dernier « bon à tirer, » il lance un suprême appel à Jean Wallon, le paradoxal mais savant penseur, qui après avoir été le Gustave Colline de Murger, sera, sous la Commune, l’administrateur éphémère de la Bibliothèque Nationale : « Mon cher philosophe, je vous envoie sur épreuves le volume dont je vous ai parlé. Soyez assez bon pour écrire en marge, au crayon, de votre meilleure écriture, toutes les critiques, remarques, objections, etc., que vous trouverez à me faire sur le fond et sur la forme. Plus il y en aura, plus je vous saurai gré de la peine que vous aurez prise pour moi. Mille amitiés et d’avance mille remerciements [2].

Ainsi remanié, augmenté et suivi de trois fragments étendus, empruntés au Recueil des monuments inédits, qui pouvaient le mieux mettre en lumière son importance et son vrai caractère, l’Essai sur l’Histoire du Tiers-Etat parut dans le courant de mars 1853.

Le moment était mal choisi pour la publication d’une étude aussi grave. On était à peine remis des émotions causées par

  1. 30 mai 1852.
  2. 23 février 1853.