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L’une est la princesse Belgiojoso, l’autre, une Anglaise des plus distinguées d’intelligence, d’un grand cœur et d’un noble caractère, mariée à un membre whig de la Chambre des Communes, lady Holland, qui, lors de ses fréquents voyages à Paris, prodigue à l’aveugle les témoignages de la plus charitable affection, avec laquelle il aime le plus oublier ses souffrances en de longues causeries d’histoire et de littérature.

C’est à celle-ci, moins éloignée que la princesse, que vont d’abord ses confidences.

« En vous parlant de mes répugnances pour l’école de philosophie à laquelle se rattache Emerson, j’étais loin de faire aucune allusion à Fichte. Celui-là ne vous invite pas à un mysticisme qui énerve en donnant le vertige. Il fortifie l’âme et, sauf l’Evangile, je ne connais rien de plus beau que sa morale. Je ne me souviens pas d’avoir lu le chapitre de la Croyance et, sur votre parole, je vais me le procurer. Cette lecture qui vous a été bonne, viendra pour moi très à propos, car je suis maintenant à l’égard de la foi en des pensées plus sérieuses que jamais. J’inclinais depuis longtemps, mais par je ne sais quelle paresse d’esprit, je différais de faire là-dessus mes comptes avec moi-même. »

Ici, revinrent d’elles-mêmes les incertitudes que le néophyte voulait bannir de sa pensée. Du moment que l’esprit même, le fond des croyances ne lui suffisait pas et qu’il lui fallait la forme, la réalité extérieure et pour ainsi dire plastique de la foi, ce devenait pour lui une urgente nécessité de faire son choix entre le Protestantisme et le Catholicisme.

Vingt-cinq ans plus tôt, durant son premier séjour à Carqueiranne, l’auteur de la Conquête, on s’en souvient peut-être, avait été vivement sollicité d’embrasser la Réforme et nous avons, à ce sujet, relaté les premières tentatives, dont il s’était vu l’objet, d’ailleurs récalcitrant. De nouveaux et persévérants efforts, dont quelques-uns empruntèrent une forme romanesque, furent alors répétés auprès de lui, pour l’amener il aux consolations de la Foi » comprise selon Calvin. De Genève, l’ardent M. d’Espine voulut catéchiser encore, faisant parvenir à son ami tout un paquet de tracts édifiants, œuvres choisies d’un certain pasteur Ryle, fort en honneur chez les Piétistes.

Tant de zèle pieux allait être perdu. Augustin Thierry ne trouvera jamais dans la Confession protestante, sous quelque