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AUGUSTIN THIERRY
D’APRÈS SA CORRESPONDANCE ET SES PAPIERS DE FAMILLE

VI [1]
LES ALTERNATIVES D’UN DÉBAT INTÉRIEUR

La Révolution avait encore entraîné pour Augustin Thierry d’autres conséquences désolantes : elle avait dispersé la plupart de ses amis.

Certains, comme Auguste Trognon et Ary Scheffer, avaient accompagné ou rejoint la famille royale dans son exil. D’autres, le comte de Circourt, Ulric Güttinguer, MM. de Cherrier et de la Villemarqué s’étaient, durant les troubles, retirés en province et s’y attardaient, dans l’insécurité du lendemain. Enfin la princesse Belgiojoso, après avoir acclamé la République, la maudissait depuis l’expédition de Rome et, dans le premier éclat de son ressentiment, s’étant juré de ne jamais rentrer en France, venait de partir pour Constantinople, en attendant d’acheter un domaine en Asie-Mineure, où elle allait continuer une existence d’aventures et achever d’engloutir sa fortune dans la malheureuse exploitation agricole de Ciuq-Maq-Oglou.

Ils continueront cependant de correspondre ; l’historien restera comme auparavant pour son amie le plus dévoué des conseils, revoyant avec sollicitude les nouvelles ou les articles d’impressions qu’elle lui fait parvenir, les recommandant au National, s’employant de tout son crédit à les faire agréer par Buloz : cette « incroyable résolution, » à laquelle il refusera

  1. Voyez la Revue des 15 octobre, 1er novembre et 15 décembre 1921 ; 1er janvier et 1er février 1922.