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aussi du prochain départ de Perlet. Si la police de Bonaparte, avisée par quelque scélérat, allait lui mettre la main au collet quand il débarquera sur le continent !... — « Que d’angoisses pour moi jusqu’au moment où je vous saurai arrivé ! » — « Si je n’avais pas la satisfaction de vous embrasser, répétez-vous que mon sort est lié au vôtre et que rien au monde ne me séparera plus d’un ami comme vous ! » Perlet s’épanche aussi, en lettres non moins affectueuses ; il confie ses tristesses et ses déboires ; il a vu le Roi, mais n’a reçu, ni à Gosfield, ni chez les ministres, l’accueil « auquel il était en droit de s’attendre. » Et Fauche le console : — « Votre lettre, mon excellent ami, me fend le cœur ; de grâce, prenez courage. Le principal de votre voyage est rempli : vous avez vu Fietta (Louis XVIIl) et vous pourrez rendre un compte exact du pénible de sa situation ; elle intéressera toujours davantage ses vrais sujets, auxquels vous aurez la jouissance de porter l’expression de ses vœux... »

Apprenant que Perlet va se rembarquer, il n’y tient plus : quitte à risquer la déportation, il veut embrasser ce coadjuteur admirable ; il a tant de choses à lui dire ! D’abord, il s’efforcera de lui soutirer les noms des membres du Comité ; et puis, il veut savoir quel est le traître qui a vendu le pauvre Vitel : il sait, puisque Perlet le lui a fait comprendre, que son neveu était dès avant son départ de Londres, signalé à la police impériale ; c’est donc à Londres même que se trouve l’assassin et Fauche soupçonne de ce crime odieux son ennemi acharné, Puisaye ; mais il souhaiterait une certitude avant de tirer du misérable une vengeance éclatante. Alors, avec l’aide de l’ami Danican, il combine une rencontre : Perlet viendrait passer un dimanche à Uxbridge, à mi-chemin d’Oxford ; Fauche irait l’y retrouver ! — il Nous souperons ensemble samedi soir et nous ferons le lendemain un bon dîner. » Et pourquoi Perlet n’amènerait-il pas Mme S... qui pourrait être accompagnée de Mme Th... ? — « Ça ferait une partie, » Cet homme prévenant pensait à tout.

La partie eut lieu ; mais Fauche ne put tirer de son ami ni les précisions tant désirées sur le Comité, ni le nom de l’assassin de Vitel, car Perlet restait sombre et il importait avant tout de lui remonter le moral. Il éprouvait, en effet, quelque dépit : à sa seconde visite chez le comte d’Avaray, il avait trouvé porte close ; le confident de Louis XVIII ayant, par la voix de son valet de chambre, déclaré « n’être pas visible. »