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comme instrument de cette politique germano-turque qui encourageait, si elle ne mettait en mouvement, le fameux panislamisme. Reçu dans différents milieux indigènes, cet émissaire rencontra un groupe d’ambitieux qu’il encouragea à fonder un journal sous le titre du Tunisien complété peu après par une autre feuille, celle-ci en français, afin de montrer aux esprits candides de la Métropole sous quel joug gémissait la Tunisie ; on discerne déjà, à peu de chose près, le plan de la « Tunisie martyre, » pamphlet récemment paru. Quoi qu’il en soit, nombre d’indigènes ne se doutèrent pas, au début, de la manœuvre, d’autant que l’occupation italienne de Tripoli devait échauffer les esprits, fournissant un prétexte pour allier la religion à un début de nationalisme qui déborda sur les « jeunes Algériens. »

La Tunisie aux Tunisiens, proclame-t-on à Tunis ; à Alger, on se borne à réclamer pour les musulmans algériens l’accès de la cité française où ils apporteraient leur statut religieux et où ils prétendent que nous n’aurions pas à douter de leur loyalisme ; cependant, quand on connaît la nature des liens qui existent entre Tunis et Alger, l’âpreté de ces revendications réagissant les unes sur les autres, la Métropole agira prudemment en observant une extrême vigilance ; ne sait-on pas que, lors du séjour du président Wilson à Paris, une démarche fut faite pour essayer de poser les revendications nationalistes des indigènes africains ?


H. DE LA MARTINIÈRE.