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De son côté, le parti qui a supplanté les « Jeunes Algériens » est très remuant ; il poursuit la naturalisation des indigènes dans leur statut religieux, la suppression totale des pouvoirs disciplinaires des administrateurs et des juridictions d’exception, l’application du droit commun à tous, sans exception et sans aucune distinction, la représentation au Parlement des indigènes non naturalisés et enfin l’assimilation complète, à égalité de titres, des fonctionnaires indigènes à leurs collègues français, programme cher aux « Jeunes Algériens. » La scission est donc plus apparente que réelle : elle cesserait en face de circonstances nouvelles, par exemple, dans l’intérêt islamique commun.

Il est à peine besoin d’ajouter que si quelques-unes de ces revendications méritent d’être prises en considération, — telles que la représentation des indigènes non naturalisés à un Conseil quelconque de la Métropole, et l’assimilation, dans certains cas, des fonctionnaires indigènes à leurs collègues français, à égalité de titres, — en revanche, les autres ne sauraient être envisagées sans mettre en jeu notre établissement dans l’Afrique du Nord. C’est ainsi que lorsque les dirigeants du parti, pour justifier leurs prétentions à obtenir la qualité de citoyens français, dans le statut indigène, en faveur des musulmans algériens, invoquent le précédent des nègres des quatre communes du Sénégal ou celui des Noirs des Antilles ou celui des Indiens, tous citoyens français, comme on sait, ils feignent d’oublier qu’il n’existe aucune similitude entre la situation de ces différentes parties de notre domaine colonial et celle de l’Algérie. Nos petits établissements en Hindoustan, aux Antilles, ou même les conditions qu’offre le Sénégal, ne peuvent, en effet, être mis en parallèle avec nos possessions de l’Afrique du Nord où l’immense majorité de la population est musulmane et touche aux pays islamiques.

Certains des chefs algériens de ce nouveau parti sont intéressants, tel ce délégué financier indigène de la province d’Oran dont le programme est dominé par l’orthodoxie et par les préjugés musulmans dans ce qu’ils ont de plus étroit. Un long séjour à Paris pour ses études de droit, lui a permis d’acquérir, dit-il, non sans malice, la connaissance de nos incertitudes et de nos faiblesses sans qu’il ait, le moins du monde, été gagné, ajoute-t-il, à notre civilisation et, de fait, l’ancien habitué du quartier latin et des milieux cultivés de la capitale est