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réponses vagues ou contradictoires, des hypothèses, des présomptions.

Si j’étais néanmoins forcé de conclure, je dirais que la politique funeste, dont l’Impératrice et sa coterie porteront la responsabilité devant l’histoire, leur est inspirée par quatre personnes : le président de l’extrême-droite au Conseil de l’Empire, Stchéglovitow, — le métropolite de Pétrograd, Mgr Pitirim, — l’ancien directeur du Département de la police, Biéletzky, — enfin le banquier Manus.

En dehors de ces quatre personnes, je ne vois qu’un jeu de forces anonymes, collectives, dispersées, parfois inconscientes, qui traduisent peut-être uniquement l’action séculaire du tsarisme, son instinct de conservation, ce qui lui reste de vitalité organique et de vitesse acquise.

Dans le quatuor, j’attribue un emploi spécial au banquier Manus : il assure les relations avec Berlin. C’est par lui que l’Allemagne ourdit et entretient ses intrigues dans la société russe ; il est le distributeur des subsides allemands.



Mercredi, 13 décembre.

Hier, l’Allemagne a fait remettre aux États-Unis d’Amérique une note par laquelle, en son nom et au nom de ses alliés, elle se déclare prête à ouvrir immédiatement une négociation de paix. A l’appui de cette solennelle affirmation, aucune condition quelconque n’est indiquée.

Du premier coup d’œil, cette note apparaît comme un stratagème, un piège, destiné à provoquer dans le camp ennemi un mouvement de pacifisme et à disloquer notre coalition. Que l’Allemagne nous fasse d’abord connaître quels plans sont les siens, quelles réparations elle est disposée à consentir, quelles garanties elle nous offre, et nous prendrons sa proposition au sérieux.

Très souffrant d’une crise de rhumatisme qui me retient au lit, je reçois la visite de Buchanan et de Carlotti. Nous pensons, tous les trois, de même.



Jeudi, 14 décembre.

L’Empereur a confié le portefeuille des Affaires étrangères au contrôleur général de l’Empire, Nicolas-Nicolaiéwitch Pokrowsky.