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lorsqu’il avait découvert, au travers des glaciers, quelque chemin que le pied des hommes n’avait jamais foulé, et fait ainsi quelque expédition qu’un Macdonald, un Durier et autres familiers des Alpes, avaient d’avance proclamée incroyablement difficile et quasiment impossible <ref> Voir spécialement le curieux récit relatif au Mont Blanc (Rivista mensile del Club alpino italiano, IX, 1890, p. 326-330). </<ref>. Il apportait, dans son escalade des rayons de l’Ambrosienne, la même intrépidité d’allure, le même goût de la découverte inédite, le même souci critique de rectifier les erreurs, lourdes ou légères, qui, comme une maligne ivraie, s’éternisent dans le champ de la science.

Certains traits de cette vie savante rappelaient la nomade initiative des érudits du XVIIe siècle. Bénédictins ou Bollandisles, courant l’Europe en quête de manuscrits ; un jour de l’année 1900, on vit Mgr Ratti survenir sur les ruines de ce qui fut l’abbaye de Bobbio, et demander à tous les échos ce qu’étaient devenues les innombrables richesses littéraires et historiques autrefois conservées dans ce beau foyer de culture : personne, hélas ! ne pouvait même lui signaler l’emplacement précis où s’était élevée la bibliothèque de Bobbio. Il trouvait pourtant, en cherchant bien, trois procès-verbaux de la liquidation de cette bibliothèque durant la période révolutionnaire, et son imagination fertile en espoirs, — tout grand bibliothécaire est un optimiste, — l’amenait à supposer qu’en France, qu’à Cambridge, on retrouverait peut-être, éparpillés, quelques-uns de ces trésors dispersés. Une somptueuse et savante plaquette sur les dernières destinées de la bibliothèque et des archives de Saint-Colomban à Bobbio confiait au public ses déceptions et ses espérances : ainsi n’avait-il constaté l’envol des manuscrits que pour aspirer à les rattraper en quelque coin d’Europe.

Dans son dépistage des manuscrits qui jouaient à cache-cache, le futur Pape connut parfois d’authentiques joies sacerdotales. L’Ambrosienne, en particulier, lui ménagea un jour une trouvaille mystique de grand prix. Il admira toujours beaucoup les Exercices de saint Ignace, « ce livre, écrit-il, qui tout à coup s’affirme et s’impose comme le code le plus sage, le plus universel, du gouvernement spirituel des âmes, comme une source inépuisable de la piété la plus profonde en même temps que la plus solide, qui excite irrésistiblement et guide en toute assurance à la conversion, à la plus haute spiritualité et