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REVUE MUSICALE


Théâtre de l’Opéra-Comique : Dans l’ombre de la Cathédrale, drame lyrique en trois actes, d’après le roman de M. Blasco Ibanez ; poème de MM. Maurice Lena et Henry Ferrare, musique de M. Georges Hüe. — Reprise de Don Juan. — Le Don Juan de Mozart, de Charles Gounod. — Théâtre de l’Opéra : La Mégère apprivoisée, comédie lyrique en quatre actes, d’après l’adaptation de P. Delair : paroles de MM. Henri Cain et Edouard Adenis, musique de M. Charles Silver.


Dans l’ombre de la Cathédrale est un drame socialiste et conservateur, une impie et pieuse histoire, où l’avantage final reste à la religion. Dans l’ombre de la cathédrale, de la cathédrale de Tolède, furent élevés deux frères, Esteban et Manuel. Manuel, qui donnait de grandes et saintes espérances, Manuel a mal tourné, s’étant fait anarchiste et démagogue errant. Esteban, lui, n’a pas tourné du tout : il est demeuré fidèle à sa croyance, ainsi qu’au service de sa cathédrale, dont il est devenu quelque chose comme le sacristain en chef. La profession d’anarchiste a perdu Manuel. Il revient, misérable, malade, auprès de son frère, qui l’accueille tendrement. La vieille Tomasa, leur tante, ne fête pas avec moins de joie le retour du neveu prodigue. Prodigue, mais non repentant. Son premier soin est de prêcher à tout le petit personnel de la cathédrale le communisme, l’athéisme, la haine du capital, les droits du travail et autres fariboles. On dirait du Jaurès en musique. Et cela n’est pas sans rappeler aussi, dans un jargon socialo-lyrique assez fâcheux, certains endroits du Messidor de M. Bruneau ou les moins bons passages de Louise.

Jusqu’ici, l’ombre de la cathédrale n’a point assagi Manuel. Mais ce que n’a pas fait la vieille église, une jeune et pauvre fille l’accomplira. Esteban eut jadis une enfant, Sagrario. Elle s’est perdue elle aussi par amour, non de toute l’humanité, mais d’un seul homme. Abandonnée, consumée elle aussi par la maladie et la misère, mais