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Hongrie ; et les deux nationalités issues des décombres de la Monarchie apostolique, la Tchécoslovaquie et la Yougoslavie, causent chacune avec le Pape par l’intermédiaire d’un ministre. La Roumanie à son tour s’est fait représenter au Vatican. Et les nonciatures de Prague, de Belgrade, de Bucarest, assurent au pouvoir papal, dans ces diverses capitales, des points d’attache. « Le Saint-Siège ne peut celer sa joie, écrivait naguère le cardinal Gasparri au premier messager des intérêts roumains, le prince Ghika, d’avoir à entrer en relations avec un peuple de civilisation latine pour lequel il a nourri constamment les plus vifs et les plus profonds sentiments de sympathie [1]. » Un autre État du monde balkanique a dès maintenant ébauché avec le Saint-Siège un premier dialogue, c’est la Grèce ; le ministre de Grèce à Madrid, qui personnellement est un catholique, arrivait à Rome, à l’automne de 1921, pour élaborer un Concordat [2]. La Pologne ressuscitée installa tout de suite à Rome un ministre, et les petits États libérés de l’hégémonie russe, Finlande, Esthonie, Ukraine, Lithuanie, ont commencé d’acheminer vers les Palais apostoliques des émissaires de leurs vœux.

Pas de papisme, avait dit l’Angleterre, trois siècles durant. Un instant, à l’époque de la Révolution française, lorsque la flotte britannique de la Méditerranée avait eu besoin des ports pontificaux pour s’y ravitailler, le gouvernement de Londres avait expédié auprès de Pie VI sir John Hippisley et accueilli sur les rives de la Tamise, comme « envoyé extraordinaire de Sa Sainteté le Pape, » Mgr Erskine. Le grand publiciste Burke s’était alors réjoui que le Cabinet britannique se fût libéré de certaines préventions à l’endroit de Rome, qui d’après lui avaient produit un grand mal et empêché beaucoup de bien. « Je dois confesser, écrivait-il, que si la chose dépendait de moi, je nouerais avec la Cour de Rome des relations politiques beaucoup plus caractérisées. Si nous nous y dérobons, c’est de notre côté, non du côté de Sa Sainteté, que sera la bigoterie. » Mais Burke s’était prématurément réjoui ; les missions de sir John Hippisley et de Mgr Erskine étaient demeurées sans lendemain ; et le bill de 1848, tendant à l’établissement de relations diplomatiques avec la Cour de Rome, avait été corrigé par de désagréables amendements, qui substituaient aux mots « Souverain Pontife »

  1. Wladimir Ghika, Revue des Jeunes, 26 mars 1921, p. 654.
  2. Nouvelles religieuses, 13 novembre 1921, p. 508-509.