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Chronique 31 janvier 1922

CHRONIQUE DE LA QUINZAINE

Le coup de théâtre qui prive, pour un temps, la Revue des Deux Mondes de son éminent chroniqueur et donne à la France, en la personne de M. Raymond Poincaré, le chef expérimenté et ferme qui saura défendre ses intérêts dans une crise difficile, est un grand événement de notre vie politique. Il ne s’agit point ici d’un de ces accidents parlementaires qui, sous de futiles prétextes, déplacent la majorité et font succéder, à une équipe fatiguée, des ministres plus frais. Il n’y a pas eu de vote : une vague de fond de l’opinion nationale a emporté M. Briand. C’est l’avenir même de la France qui est en jeu ; c’est sa sécurité militaire et son équilibre financier ; c’est l’orientation de sa politique extérieure et le choix de ses alliances. C’est plus encore, car la crise n’intéresse pas seulement notre pays ; elle implique toute la question de l’exécution du Traité de Versailles, la restauration d’un ordre économique et financier en Europe, la consolidation de la paix.

M. Poincaré, dans sa dernière chronique, a relaté les premières journées de la Conférence de Cannes et les inquiétudes qu’elles éveillaient en lui. M. Briand, qui avait déjà pris à Londres des engagements préliminaires très graves, a été, à Cannes, habilement amené au pied du mur. Il s’est trouvé en face de deux alternatives également redoutables : ou paraître rejeter l’occasion d’un pacte avec la Grande-Bretagne, ou accepter toutes les conditions que le cabinet de Londres jugerait opportun de lui présenter. C’est bien ainsi que la question se trouvait posée ; c’est l’impossible option qui était offerte à M. Briand. Le Times, organe de nos meilleurs amis d’Angleterre, écrivait : « La chose essentielle est l’accord entre les deux pays... Que les hommes politiques français réfléchissent à la valeur d’une semblable alliance tant pour la France que pour l’Europe entière. La