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de la durée du travail ne nuirait pas à la production et même l’accroîtrait. Nous avons montré plus haut qu’il n’en a rien été.

Le directeur du bureau de la Conférence internationale du Travail est aujourd’hui forcé de reconnaître qu’une réaction s’est produite contre le mouvement qui entraînait en 1918 et 1919 les Parlements à voter des lois consacrant la journée de huit heures et la semaine de quarante-huit heures. Nous retenons l’aveu suivant échappé à sa plume : « L’opinion, se demande-t-il, a-t-elle été frappée par les conséquences économiques de la réforme ? ou bien la concurrence sur le marché mondial est-elle devenue telle que les États industriels ne puissent y souscrire ? Comment, à l’heure où les demandes paraissent inférieures aux offres, envisager le développement, ou même le maintien, d’une réforme qui peut constituer une charge pour l’industrie ? et cela en présence du fait que les plus grands pays industriels du monde, les États-Unis, l’Angleterre et l’Allemagne, restent en dehors de l’organisation internationale du Travail ? »

Le problème a été résumé par M. Jonnart dans le discours qu’il a prononcé au mois de novembre 1921 à l’Assemblée générale de la Fédération des Associations agricoles du Pas de Calais et des départements voisins. « En Angleterre, disait l’éminent homme d’État, pas de loi. Les industries où la journée de huit heures est en vigueur, la doivent à des accords collectifs librement consentis entre les Trade Unions et les patrons. Aux États-Unis, la durée du travail n’est limitée que pour les ouvriers travaillant au compte de l’Union ou dans une entreprise adjudicataire de travaux publics. Les autres ouvriers ne bénéficient des huit heures que là où un contrat collectif l’a établie. En Australie, au Canada, dans les colonies Sud-Africaines, pas de loi de huit heures. En Allemagne, le projet déposé comporte des dérogations telles qu’il n’en subsiste guère qu’un principe abstrait. Il en est de même en Autriche, en Pologne, en Espagne, en Suède. Ce n’est qu’en France que la loi est strictement appliquée. »

Ce n’est pas l’heure qu’il faudrait choisir pour songer à étendre à l’agriculture une réglementation du travail qui, sur ce domaine, est en contradiction avec la nature elle-même. L’organisation du labeur agricole ne dépend pas de la volonté