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Paris que dirige avec tant d’autorité le professeur Charles Maurain. Et maintenant, entrons un peu dans le vif de notre sujet.


Quelle est la cause des séismes ? Depuis Aristote et son étrange théorie du vent de la Terre, depuis nos ancêtres antiques et médiévaux qui pensaient y trouver des signes de la colère céleste, nos idées ont bien évolué.

On sait aujourd’hui que les tremblements de terre ne viennent pas d’en haut, mais d’en bas. Ou plutôt, — car j’ai tort d’être aussi catégorique, — il n’y a plus guère d’hommes de science qui cherchent ailleurs que sous nos pieds l’origine exclusive des séismes. Il en est cependant, et de fort avertis, comme M. Mesnard ou comme le professeur Alphonse Berget, qui n’hésitent pas à penser que l’attraction luni-solaire pourrait avoir une action décisive sur le déclenchement des tremblements de terre. A l’appui de cette manière de voir, celui-ci rappelle, non sans force, que l’écorce terrestre toute entière subit chaque jour des sortes de marées non négligeables, encore qu’imperceptibles à nos sens, qui éloignent et rapprochent alternativement de plusieurs décimètres la croûte terrestre du centre de la terre. Il invoque des statistiques d’où il résulterait que les séismes sont particulièrement nombreux à l’époque des équinoxes (c’est-à-dire des grandes marées) [1]. Il rappelle que l’éruption de la Montagne Pelée, à la Martinique, en 1902, et le séisme, et le ras de marée qui l’accompagnèrent, se produisirent un jour où le soleil et la lune, placés en ligne droite avec la terre, ajoutaient leurs attractions sur les éléments de celle-ci. Ne peut-on pas admettre que les marées correspondantes du magma interne du globe ne puissent dans ces conditions, favoriser en ses points faibles, la dislocation de la croûte superficielle ? Cela n’a rien d’invraisemblable. C’est aussi l’opinion du célèbre géophysicien hongrois von Kôveslighety, selon qui les facteurs externes (parmi lesquels il faut ranger la pression barométrique variable de l’atmosphère sur le sol), seraient les causes déterminantes déclenchant les mouvements brusques de l’écorce, grâce aux variations de son élasticité.

En face, nous voyons une école de géologues émincnts, parmi lesquels se trouve une des principales autorités sismologiques, M. Montessus de Ballore, qui considèrent les séismes comme étant

  1. La vie et la mort du Globe, par Alphonse Berget. Ernest Flammarion, éditeur.